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Alès : solidarité face àla Justice et au fichage

dimanche 11 décembre 2011

Le 25 octobre 2011, Jéjé s’est fait interpeller pour deal de shit. Il a fait une garde àvue durant laquelle il a refusé le prélèvement ADN. Il est convoqué ce 14 décembre à9 heures, en CRPC (comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité) au tribunal d’Alès [1].

Au cours de la garde àvue, en plus d’inculper Jéjé pour insoumission au fichage et commerce illégal, les flics ont mené plusieurs interrogatoires portant sur ses relations et idées politiques (mouvement contre la réforme des retraites, venue du président àAlès, rapport avec des organisations politiques, avis sur la tenue d’un G20 àNice, etc.). Questions auxquelles il a refusé de répondre. On nous veut exploités et dociles, isolés et fragiles face àla loi de l’économie et du capital. Il s’agit pour les flics d’identifier et de surveiller les formes de résistance àla misère et de critique du système. Ainsi, c’est une condition sociale et ses velléités de s’en sortir qui sont criminalisées.

Père célibataire de deux enfants, précaire quelconque, Jéjé se démerde comme il peut pour assurer le quotidien. Dans un monde où l’argent et la propriété font tout, la justice condamne des milliers de Jéjé qui se sont fait prendre àvouloir s’en sortir un peu moins mal. Le banc des prévenus est rempli de dépossédés, d’enragés rongeant leur frein, que la justice prétend remettre dans le droit chemin par ses sermons hypocrites et ses condamnations vengeresses. Une justice de classe donc, qui, quotidiennement, condamne en fonction de critères socio-économiques, en renvoyant l’accusé àses « erreurs  » personnelles. Le prévenu serait le seul « coupable  » de la situation, pour dégager toute responsabilité àla société. En individualisant*** ainsi son exercice, la justice cherche aussi ànous priver de nos moyens de nous défendre, en ôtant le caractère politique de la légalité et du crime. Chaque affaire est le miroir des inégalités et de la misère sociale.

La logique de contrôle et de répression se développe de manière exponentielle, sous l’impulsion d’une logique sécuritaire et grâce àla massification de l’informatique : en 2010, près de 60 fichiers de police et gendarmerie étaient recensés, auxquels il faut y ajouter plusieurs dizaines, gérés par les diverses administrations et ceux des entreprises privées (sites internet, grande distribution, officines de sécurité…). Cette frénésie du classement permet àl’État, grand gestionnaire des ressources humaines, de manager et de contrôler la population, de la masse àl’individu. Elle engendre la banalisation du fichage afin de gérer le prolétariat dans ses déplacements et ses loisirs : d’optimiser son exploitation. Avec l’aide de ses conseillers, sociologues et autres spécialistes des sciences humaines, il isole des catégories sociales, qu’il surveille et réprime spécifiquement : « clandestins  », « gens du voyage  », « bandes de jeunes  », « islamistes  », « anarcho-autonomes  », etc.

L’État déploie un arsenal répressif pour distiller la peur, pour prévenir et endiguer les révoltes et insoumissions. Il doit préserver les valeurs essentielles qui fondent et entretiennent les inégalités sociales : respect de l’autorité, propriété privée, travail, morale. Il doit défendre sa classe et ses valeurs, aujourd’hui plus crà»ment que dans un passé récent, face aux flots de pauvres, d’ici ou d’ailleurs, produits par la machine capitaliste. Ce ne sont pas les dérives d’un système qui glisserait vers un autre (fasciste ou totalitaire), c’est l’État et son régime démocratique qui adapte sa gestion de la population aux nécessités économiques.

Les sciences (ADN, biométrie, vidéo-surveillance…) apportent dans le domaine répressif une contribution notable [2]. La justice, pour condamner, se drape d’une prétendue objectivité. Elle utilise tout un tas d’experts (psychiatres, graphologues, experts en balistique…) pour établir la « preuve formelle  ». C’est une cour de spécialistes, tous renfermés dans leurs domaines désincarnés, qui imposent leurs sentences aux accusés. L’utilisation des profils ADN s’intègre en plein dans cette mascarade. Le refus d’être enregistré dans le FNAEG est un acte d’insubordination et de protection face àla logique du fichage génétique.

Des solidarités sont àconstruire et àmultiplier pour sortir de l’isolement et du cloisonnement dans lequel le système cherche ànous maintenir. Rencontrons-nous pour discuter et affirmer notre solidarité, face àcette justice de classe.

Rassemblement le 14 décembre 2011, àpartir de 9h, devant le palais de justice d’Alès.

Kalimero sous le soleil.

***Note de non-fides.fr : Si la justice individualisait réellement, elle n’utiliserait pas les mêmes lois pour des milliers d’individus et d’affaires différentes. La négation des spécificités de chaque individu et de chaque cas n’est pas l’individualisation, au contraire. Une chose est sure : la justice isole. Cette note parce que nous voyons ce concept d’individualisation de la justice fleurir dans de nombreux textes de camarades, et que nous aimerions rappeler que l’individu, l’individualisation et l’individualisme sont des mots qui n’« appartiennent Â » pas àl’ennemi, il suffit de parcourir un peu ce site pour s’en rendre compte, ou plus simplement encore, consulter l’étymologie du mot individu pour se rendre compte que l’utilisation qui a été faite de ce mot par l’Etat, le Capital et ses libéralismes est aussi erronée que, par exemple, ses utilisations des mots « liberté Â », et même « Ã©galité Â », d’autres termes largement employés par de nombreux révolutionnaires.


[1Pour voir des informations sur les procédures et nos droits, il existe un traité de self-défense juridique « Face àla Police / Face àla Justice  », consultable sur http://www.guidejuridique.net/

[2Pour plus d’informations sur l’ADN, on trouvera les trois brochures « L’apparence de la certitude, L’ADN comme “preuve†scientifique et judiciaire  », « Du sang, de la chique et du mollard !  » et « â€œOuvrez la bouche†, dit le policier  », sur le site http://adn.internetdown.org/