Accueil > Articles > Urbanisme, mixité sociale et gentrification > Berlin : Les responsables de la gentrification ont un nom, un numéro de (...)

Berlin : Les responsables de la gentrification ont un nom, un numéro de téléphone et une adresse

dimanche 16 mars 2014

A Berlin, la lutte contre la gentrification menée dans plusieurs quartiers rendent la vie des promoteurs et agents immobiliers de moins en moins tranquille…

Il y a quelques jours, des affiches visant de nombreuses crapules responsables de projets d’habitation de luxe ont été collées dans plusieurs quartiers populaires de Berlin en proie àla spéculation d’investisseurs et de promoteurs – comme celle-ci dans le quartier de Friedrichshain :

l’affiche dit : « Avertissement – cet homme* veut détruire votre espace de vie  » *Il s’agit de l’agent immobilier Klaus-Peter Hoe

Ces affiches donnent toutes les infos pour s’adresser ou rendre visite àces spéculateurs avec numéros de téléphone, adresses, etc…

Cette crapule nommée Hoer est responsable des ventes d’appartements de luxe pour un nouveau projet de développement dans le quartier de Friedrichshain : il s’agit de 47 appartements/lofts de luxe construits sur un terrain vague, qui seront vendus entre 3500 et 4100 euros le mètre carré. Ce qui suffit pour de nombreux habitants de ce quartier àdéclarer la guerre àce projet de gentrification.

Les vagues d’attaques contre ces projets urbanistes de la ville se sont multipliés depuis plusieurs années dans les quartiers populaires de Kreuzberg et Friedrichshain. Il y a un peu plus d’un an apparaissait la Berlinerliste, répertoriant ces projets pour riches et les attaques qui en ont découlées. En 2009, une résidence de luxe construite récemment s’est fait incendier (que partiellement àcause de l’intervention des riverains). Depuis, les agents de la gentrification et nouveaux bobos habitant ces quartiers montent la garde devant les bâtiments une bonne partie de la nuit.

Les murs d’une usine désaffectée en cours de rénovation ont été tagués d’un « Porcs de yuppies – coups de feu dans les jambes« 

A Kreuzberg, le projet d’habitation de luxe Carloft a été attaqué àplusieurs reprises àcoups de pierres et de peinture. Bien évidemment, les attaques ne se limitent pas aux constructions d’appartement luxueux, mais visent également les bars, les restaurants et commerces qui participent activement àla gentrification.

Mais la lutte contre la gentrification prend une autre forme en visant individuellement les responsables, ce qui fout la trousse aux urbanistes et autres agents immobiliers qui reçoivent entre autre des lettres de menace de mort. Et ainsi de permettre aux habitants de s’adresser directement àceux qui détruisent l’âme [sic] de leur quartier.

Autre exemple, l’entrepreneur Maik Uwe Hinkel, constructeur d’un projet de logements de luxe àl’East Side Gallery et qui est vivement contesté, a reçu personnellement des menaces de mort àson domicile. Il bénéficie aujourd’hui de protection policière.

Reformulé àpartir d’un article en allemand de leur presse – die Welt, 08/03/2014 par Le Chat Noir Émeutier.


Un article publié sur slate.fr (presse poubelle) àpropos de la Berlinerliste et des attaques menées, 22/07/2013 à16h12 :

La liste de Berlin : les adresses de luxe àattaquer pour lutter contre la gentrification

Depuis quelques mois, des activistes d’extrême gauche qui se revendiquent de la mouvance autonome ont décidé d’en venir aux mains pour lutter contre la hausse des loyers àBerlin, rapporte le quotidien Berliner Zeitung. Dix-sept délits ont été recensés par la police depuis le début de l’année, qui a mis en place une équipe de six enquêteurs pour retrouver la piste des coupables.

La dernière cible àlaquelle s’en sont pris les activistes est une résidence de luxe située au cœur du quartier de Mitte, les Choriner Höfe. Dans la nuit de lundi àmardi dernier, un groupe de personnes a brisé des vitres et lancé des bombes de peintures sur les façades, et ont défoncé le pare-brise d’une Porsche garée àproximité de l’immeuble, rapporte le Berliner Morgenpost.

Quelques heures plus tard, les auteurs des dégradations postaient un message de revendication sur la page Indymedia d’un collectif d’extrême gauche :

« Nous en avons marre de vos ghettos de luxe, de vos voitures de luxe, de vos magasins de luxe ! C’est pourquoi les Choriner Höfe, un café et une Porsche ont été attaqués la nuit dernière. En outre, des chausse-trapes ont été mis en place contre les flics. Dans un quartier qui est connu pour être complètement gentrifié, cette résidence de luxe est comme la cerise sur le gâteau de la restructuration de la ville. »

Le message a rapidement été recopié sur le blog Berliner Liste (la liste de Berlin), qui recense une centaine d’adresses de lieux àattaquer : sièges de société immobilières, bureaux de société de gérance d’immeubles, de promoteurs, de courtiers, mais aussi commissariats, tribunaux, services sociaux, centres de recherche d’emplois… Sur Indymedia, les auteurs du blog mettent en garde tous ceux qui figurent sur la liste :

« Celui qui s’illustre comme faisant partie de la restructuration antisociale de la ville atterrit sur la liste. Tous ceux qui sont sur cette liste doivent s’attendre àrecevoir de la visite. »

La liste publiée sur le blog est également complétée par les internautes. L’un d’eux donne par exemple le nom et l’adresse professionnelle d’un courtier « spécialisé dans les investissements lucratifs dans les bien immobiliers d’habitation » qui « tyrannise les locataires de ses immeubles ».

La police a essayé en vain de fermer le blog, comme l’explique le Berliner Zeitung, celui-ci étant hébergé sur un serveur àl’étranger. Les auteurs du blog recommandent d’ailleurs aux utilisateurs d’utiliser Tor avant de laisser un commentaire, afin que l’anonymat soit garanti.

Dans un éditorial paru ce 22 juillet, le journaliste du Tagesspiegel Gerd Nowakowski s’insurge contre cette réponse violente àla gentrification et àla bienveillance qu’elle suscite chez les Berlinois :

« Un tel appel àla haine prend de l’importance àcause du fait qu’aucun sujet n’agite autant les Berlinois que les loyers en hausse et la crainte de ne plus pouvoir payer l’appartement acquis dans un quartier familier. »

Et y oppose l’argument fréquemment avancé par ceux qui voient dans la gentrification de Berlin une bonne nouvelle pour la capitale « pauvre et sexy » :

« Berlin peut être contente si des personnes àhauts revenus qui créent des emplois ou participent via leurs impôts àfaire en sorte que Berlin ne reste pas la capitale du chômage s’installent ici. »