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Italie : Contribution de Gianluca depuis la prison d’Alessandria

vendredi 23 mai 2014

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Ma volonté et les idées qui vont avec sont bien sà»r plus fortes que les vexations que fomente et met en actes la démocratie, comme toute autre autorité, contre les individus qui ne s’adaptent pas àl’ordre des masses.
L’autorité est justement le pivot qui tient encore solidement tous ces principes d’exploitation, de contrôle et de domination ; et je fais l’économie de tous les « ismes  » de l’histoire qui ne sont rien d’autre que des dérivés des conditions dans lesquelles les masses se sont assujetties et soumises àleurs semblables.

La prison est certainement le sommet des diverses mesures de domestication auxquelles ont recours les Humains dominants et l’État, ni la mort ni les pires conditions de vie –si on veut les appeler comme ça– la « Â pauvreté  », ne sont comparables àl’abîme de l’enfermement.
Parfois, je me sens écrasé àdevoir me contrôler dans la joyeuse normalité des matons qui me séquestrent. Leurs discussions sur le foot, leurs grandes lectures des dépliants du supermarché, les rires hystériques et leur pénible quête de dialogue, de salut ou d’un « Â bonjour  », leurs tristes existences.

L’argent est pour moi un des nombreux poisons de l’Homme, je n’ai jamais voulu l’égalité économique ni la recherche de consensus populaires, mais en voyant l’apathie de la société aliénée ça donne l’impression d’être en guerre toute la vie alors que dehors on danse joyeusement la mazurka...

Je sais que cette normalité paradoxale que je dois affronter est justifiée par la même normalité qu’il y a hors de ces murs, dans la reconnaissance de la société envers les prisons et l’enfermement de ses semblables, envers l’État et tout ce qui est "nécessaire" pour maintenir l’ordre social, un pouvoir ou n’importe quel gouvernement qui, pour beaucoup, doit inévitablement exister.
Ces zoos pour Humains ou camps de concentration –je préfère les appeler ainsi– servent àmaintenir un statut politique social et économique.

Nous sommes nourris deux fois par jour ; quand le chariot de nourriture passe, son bruit bancal est comme une fourchette frappée sur une assiette comme on utilise d’habitude pour les chiens ou les chats domestiques, puis ils nous emmènent en "promenade" comme les chiens domestiques qu’ils ont probablement chez eux.
Ces lieux te marquent sà»rement psychologiquement et physiquement au delàdu temps passé enfermé.
Je ne peux bien sà»r pas manger les bonnes choses que je cultivais dans le jardin et je devrai me contenter des exquises cochonneries insipides et sans nutriments que m’offre la maison, mais j’essaie au moins de rester toujours entraîné physiquement et mentalement.

En plus de la banque de données ADN, les travaux forcés ont déjàcommencé pour les détenus "de droit commun" : nettoyage de rues, autoroutes et voies ferrées, comme ça il y aura plus de raisons d’élever des Humains en captivité.

Certaines de mes terminologies et de mes façons de voir pourraient sembler étranges pour certain-e-s, mais c’est la réalité crue et brutale de ce qui paradoxalement nous rend égaux aux conditions des autres animaux exploités et enfermés pour l’usage et la consommation.

Même si nous affronterons mille luttes, nous devons nous libérer d’une seule cage, qu’elle soit réelle ou sociale. Ceux qui se croient particulièrement supérieurs ou prioritaires par rapport àd’autres formes de vie et de lutte ne font que justifier la soumission, l’enfermement dans des cages et le contrôle de certains sur d’autres vus comme des inférieurs àsoumettre àd’autres volontés idéologiques.

Les compagnonnes et compagnons qui me sont proches, comme tout-e-s les autres prisonnier-e-s, dans tout l’éventail de la pensée et de l’action, font que je ne me sens pas seul et, malgré les conditions de restriction de liberté, m’encouragent àpoursuivre la lutte contre l’existant qui empoisonne cette terre.

Ces méthodes de rééducation et de réinsersion dans la société civilisée ne servent àrien. Je ne veux rien savoir des petits ou grands travaux que mettent en actes les entreprises et industries pour le progrès ni de ce que les gouvernements ont l’intention de faire... j’ai déjàtout pour les saboter.

Pour l’action pour la libération de la terre et de tous les êtres vivants de la domination techno-industrielle !

Gianluca
16.04.14

***

Pour lui écrire :

Gianluca Iacovacci
Via Casale 50/A
15122 San Michele (AL)
ITALIE

[Traduit de l’italien par nos soins de Informa-azione.]


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