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Le meilleur des mondes nucléaire - 3ème partie

samedi 11 août 2012

GDF-Suez et le gaz de schiste - Gérard Mestrallet, le
PDG de GDF-Suez, concède que Fukushima a changé la
donne pour le nucléaire, essentiellement àcause des coà»ts
qui augmentent dans un contexte de crise. Et pour lui, il
ne faut surtout pas aller vers les énergies renouvelables,
trop coà»teuses, mais rouvrir le dossier du gaz de schiste
rapidement. Car c’est bien entendu la seule énergie capable
de sauver la « compétitivité  ». Bref, primat des profits,
intérêts bien compris, dépossession. Il va déjàfalloir cravacher
dur pour stopper l’industrie nucléaire – qui ne
nous sortira jamais des conséquences du nucléaire – et
ceci sera loin de nous engager vers moins de dépossession
et de dégradations écologiques. On nous prépare déjàune
sortie industrielle du nucléaire. Le capitalisme et l’industrialisme
se maintiendront même si la filière nucléaire
devait fléchir. Encore une bonne raison pour que toute
lutte antinucléaire soit une lutte contre le nucléaire, mais
aussi contre le monde qui va avec (Source : Le Monde du
7 février 2012). Par ailleurs le gaz de shiste c’est aussi des
radionucléides naturels qui pourraient être dispersés de
manière industrielle dans l’environnement : « Comme
tous les constituants de la croà»te terrestre, les gisements
d’hydrocarbures contiennent des radionucléides naturels,
comprenant principalement l’uranium 238 et ses descendants
(dont le radium 226 et le radon 222), le thorium
232 et ses descendants (dont le radium 228), ainsi que le
potassium 40. La teneur en radionucléides des gisements
d’hydrocarbures est variable, mais peut parfois être très
élevée, lorsque des conditions physico-chimiques particulières
ont favorisé la précipitation ou l’absorption, dans les
roches en formation, de l’uranium et/ou du thorium
contenus notamment dans les eaux  »
(Source Crii-Rad.)

Thulé - Nous sommes en pleine « Guerre froide  ». En
1951, 5 000 soldats américains débarquent àThulé, région
habitée du monde le plus au nord. Les 200 Inuits qui
vivent làsont déplacés plus de 100 km au nord, pour laisser
la place àune base militaire secrète, avec une piste
pour les avions chargés de lâcher les bombes nucléaires.
En 1968, le 21 janvier, un bombardier B-52 s’écrase sur la
glace alors qu’il a 4 bombes àhydrogène àson bord. Pour
trois d’entre elles, l’amorce explose, libérant le poison
radioactif (fragments de plutonium et d’uranium), une
autre n’a jamais été retrouvée et gît encore en pleine mer.
Une grande opération de nettoyage est lancée par les
Etats-Unis et le Danemark, qui administre encore le
Groenland àcette époque. Les Inuits colonisés, puis déplacés,
sont alors réquisitionnés pour essayer de décontaminer
ce qui peut l’être. Beaucoup d’entre eux-elles sont
décédé-e-s les années suivantes des suites de leur contamination
par la radioactivité, notamment des suites d’une
forme de leucémie. Mais cette catastrophe occultée n’a
bien sà»r pas provoqué ces maladies : l’alcool, le tabac et le
soleil seraient officiellement responsables. En 1994, le
gouvernement danois admet àdemi-mots sa responsabilité et offre des dommages et intérêts pour les survivant-e-s.

France - L’arme atomique est un gouffre financier pour
les un-es, une richesse pour les autres En 1967, au plus
fort, la France consacrait 1,2% de son PIB àl’armement
nucléaire (51% du budget militaire). En 2006, l’arme nucléaire
engouffrait 3,5 milliards d’euros par an. Et après,
on devrait payer leur « crise  »â€¦ C’est une chose habituelle
pour la vente d’armes. Ainsi, les chars Leclerc vendus au
rabais dans les années 1990 aux Emirats, furent en fait
payés par le contribuable français (Histoire secrète de la
Vème République, Falligot et Guisnel, 2006). Au passage,
un grand nombre de familles d’industriels se sont enrichies
(Dassault, Lagardère, etc.) avec l’appui des grands
corps d’ingénieurs de l’Etat (Ecole des Mines, Polytechnique,
Ponts et chaussées) – quand ils n’en sont pas issus. Il
est en effet habituel que les fonctionnaires des grandes
écoles, financés, passent du public au privé (pantouflage).

Japon - Des immeubles ont été construits avec du béton
irradié. Des taux de radiation d’environ 10 millisieverts
par an – soit la moitié du niveau fixé par les autorités pour
décréter une évacuation – ont été mesurés dans un bâtiment
de la ville de Nihonmatsu, à55 kilomètres de la
centrale de Fukushima. Celui-ci a été construit avec du
béton provenant des environs du site de la catastrophe
nucléaire, fabriqué avec du gravier collecté seulement un
mois après l’accident. Douze familles vivent dans cet immeuble
achevé en juillet dernier, et parmi elles des personnes
évacuées de la zone de Fukushima. Pourquoi cette
carrière a-t-elle été exploitée après la catastrophe nucléaire
 ? Dans quelles conditions ont travaillé les ouvriers
qui ont utilisé ce béton pendant la construction de l’immeuble,
et ceux qui l’ont acheminé vers Nihonmatsu ? Le
gouvernement japonais a ouvert une enquête, pour
« vérifier si des cas similaires ont pu se produire  ». Source : leur presse.

France - Depuis 2002, le Code de la santé publique interdisait
l’ajout ou l’utilisation de substances radioactives
pour la fabrication de biens de consommation et de matériaux
de construction. Toute acquisition et cession de
sources radioactives étaient sévèrement encadrées. Ce
n’est désormais plus le cas. Le 5 mai 2009, quatre ministères
– celui de l’Ecologie, de la Santé, de l’Economie et du
Logement – ont signé un arrêté interministériel qui permet
de déroger àcette interdiction. Le texte est entré en
vigueur malgré l’avis défavorable de l’Autorité de sà»reté
nucléaire (ASN). Cela signifie que demain, si EDF veut se
débarrasser de ses gravats faiblement radioactifs générés
par le démantèlement de la centrale de Brennilis, en Bretagne
(la première centrale nucléaire française àêtre démantelée),
elle aura la possibilité de les céder ou les vendre
àune cimenterie. Celle-ci transformera les gravats en
matériaux de construction, qui serviront ensuite àbâtir des
bureaux, des logements, des écoles ou des hôpitaux… Idem pour Areva. Si la multinationale ne sait que faire de
fà»ts en métaux contaminés suite àun transport d’uranium,
elle pourra les livrer àune fonderie qui le recyclera dans
des produits de grande consommation : outils, véhicules,
machines agricoles ou tuyaux. (Source : les liquidateurs du
vieux monde
)

Ukraine - En septembre 2011, les pensions de retraites
accordées aux liquidateurs de la catastrophe de Tchernobyl
sont revues àla baisse. Un campement s’organise devant
le siège du fond de retraite. Les manifestants sont
attaqués par les forces de l’ordre lors d’une tentative d’entrée
dans le parlement. Un liquidateur souffrant de problèmes
cardiaques meurt lors de cette expulsion. (Source :
Oublier Fukushima)

France - Pour mémoire, c’est sous la présidence Giscard
D’Estaing, que le programme civil de construction de centrales
nucléaire est véritablement lancé – même si la décision
semble avoir été prise avant 1974. Avant 1974, Creusot-
Loire, entreprise de métallurgie, signe le brevet américain
Westinghouse, brevet de centrale atomique àeau
pressurisée (PWR). Schneider est l’un des actionnaires
principaux de Creusot-Loire, Schneider qui est par ailleurs
lié àla famille de l’épouse de Valéry Giscard D’Estaing
(groupe Empain-Schneider) alors ministre de l’Economie
et des Finances. Plus tard, ce sera la filière PWR
du brevet Westinghouse qui sera privilégiée lors de l’arrivée
de Giscard D’Estaing àla tête de l’Etat ; ce qui fera de
Creusot-Loire le maître d’oeuvre du programme civil. A la
même époque, en 1971, Jacques Giscard, cousin du futur
président, devient directeur financier du CEA, et en 1973,
administrateur d’Eurodif. Après 1974, le programme civil
activé, l’implantation des Giscard dans l’industrie nucléaire
se poursuit. En 1975, Jacques Giscard rentre dans
la société des mines d’uranium du Niger. Toujours, la
même année, Philippe Giscard, frère de Jacques, devient
PDG de Thomson-CSF, fournisseur en électronique nucléaire.
L’année suivante, Jacques Giscard entre àFramatome,
Novatome et àla COGEMA, entreprises du nucléaires.
En 1977, François Giscard, autre frère de Jacques
devient PDG de la banque française du commerce extérieur
(BFCE), banque qui finance les exportations de
matériel nucléaire. En 1978, Jacques rentre àla caisse de
l’énergie, avant l’année suivante de rejoindre la CISMATEC,
filiale du CEA. Enfin, en 1979, le propre frère du
président, Olivier Giscard s’occupe des intérêts de Saint-
Gobain, entreprise qui fabrique du combustible nucléaire.
Bref toute la phase d’implantation du nucléaire en France,
si elle prétend défendre l’intérêt général et celui le la nation,
n’est en fait qu’un cache sexe d’intérêts beaucoup
plus privés. Le nucléaire c’est Capital !

Monde - Des désastres nucléaires on oublie souvent d’évoquer
les nombreuses chutes de satellites portant des
matières radioactives. 21 avril 1964,.un satellite américain Transit se désintègre dans l’atmosphère saupoudrant de
plutonium 238 l’atmosphère au nord de Madagascar. 18
mai 1968 le satellite américain Nimbus B-1 tombe à100
m de profondeur, près de Santa-Barbara, avec son générateur
nucléaire SNAP-19 (il a été récupéré). 11 avril 1970,
un générateur SNAP-27 contenant 1 650 000 giga becquerels
de plutonium 238 et appartenant àun module de la
mission Apollo tombe au sud des îles Fidji, par 6 000 m
de profondeur.24 janvier 1978, chute de Cosmos 954,
(Sciences & Avenir n°373, mars 1978) ce satellite est équipé
d’un réacteur nucléaire. La même année on révèle un
accident survenu en 1969 dans l’Himalaya, la CIA a dà» y
abandonner un dispositif nucléaire lui permettant d’espionner
la Chine, lequel a peut être pollué les sources du
Gange. Février 1983, le satellite soviétique Cosmos-1402
avec un réacteur nucléaire d’une radioactivité estimée à
1 000 000 de giga becquerels, tombe à1600 km àl’est des
côtes brésiliennes. (Source : Infonucléaire).

Penly - Le 05 avril dernier un incident sur une des pompes
de refroidissement du réacteur n°2 de la centrale nucléaire
a conduit àun arrêt automatique de ce dernier.
Une importante fuite d’huile a été identifiée sur une des
pompes qui servent àrefroidir le réacteur et àéviter son
emballement. Un incendi s’est alors déclaré. Cet incident
a amené l’industriel àrelâcher une quantité importante
d’eau dans l’environnement (2,3 m3 par heure). Quid
des dangers des rejets ? Quid des intervenants sur place ?
Que ce serait-il passé si les autres pompes n’avaient pas
pris le relai ? Un nouveau Three Mile Island ? Un nouveau
Fukushima ? Que ce serait-il passer sur l’EPR voisin
si il était construit ? En combien de temps Le Havre,
Caen, Rouen et Paris auraient-ils été touchés ?

France - La bombe nucléaire, ça se construit entre amis.
Que le Commissariat àl’Energie Atomique, créé dès
1945, avait pour but direct de fabriquer la bombe atomique,
c’est une chose maintenant reconnue. D’ailleurs, la
France était en pointe de la recherche nucléaire, notamment
militaire (serait-ce que recherche scientifique et recherche
militaire soient intrinsèquement liées ?), avant
guerre. Ce qui est moins connu, c’est que les dirigeants
français, radicaux (Mendès-France, Gaillard), socialistes
(Mollet), et gaullistes (Chaban-Delmas), vont s’entendre
avec les anciens ennemis l’Italie et l’Allemagne dès 1958
pour développer « la bombe  ». En effet, l’usine de séparation
isotopique de Pierrelatte était financée à45% par la
France, autant pour l’Allemagne, et 10%pour l’Italie
(jusqu’àce que De Gaulle en fasse son arme nationaliste
préféré). Et cette usine est celle qui fournit l’uranium enrichi
des bombes H, et du combustible des sous-marins à
propulsion nucléaire (Source : Histoire secrète de la
Vème République
, Falligot et Guisnel, 2006).


Extrait de la revue Pas de sushi L’Etat geiger 3
Caen, juin 2012

Mail : Pasdesushi(at)voila.fr