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Retour sur les années de braise : Les groupes autonomes et l’Organisation Action Directe (+ note introductive)

samedi 26 janvier 2019

[brun]NdNF : Nous republions ci-après la brochure Retour sur les années de braise : Les groupes autonomes et l’Organisation Action Directe afin d’éclairer la récente polémique lancée suite àla publication d’un communiqué du CRAS (et d’un témoignage signé Marinus) en rapport àune note dans un livre de Jean-Marc Rouillan récemment édité chez Agone. S’il est aisé d’imaginer qu’il s’agit de couper des cheveux en quatre ou de coller au cliché des polémiques gauchistes de notes de bas de page - et c’est d’ailleurs ainsi qu’a été pris ce communiqué du CRAS par de nombreuses institutions médiatiques d’extrême gauche comme les sites "mutus" -, il n’en est, àvrai dire, rien du tout. La question soulevée sobrement (et implicitement) par les compagnons du CRAS est bien celle de la captation des héritages anarchistes et autonomes, de la lutte en armes, par toute une historiographie apologétique et falsificatrice visant àfaire de l’organisation lottarmartiste Action Directe (et ses autres confrères anti-impérialistes militaros européens, RAF, CCC, GRAPO, etc.) le centre névralgique des derniers assauts armés portés àl’Etat et au capital àpartir de la fin des années 60 dans ces contrées, assauts auxquels ils n’ont fait que participer, au même titre que des milliers d’anonymes. Le monopole de la lutte et de l’action directe qu’ont cherché àimplanter dans les esprits les médias de la bourgeoisie, conjointement àl’Organisation AD (dernière mouture) elle-même, n’était en fait qu’une représentation construite. Des groupes informels, sans noms, sans logos et fluctuants ont existé par centaines, pour qui les actions armées faisaient partie de tout un éventail de pratiques, et qui portaient des réflexions intelligentes sur la question de la spécialisation, ce qui n’était pas le cas des... spécialistes. L’Organisation Action Directe n’était que l’arbre qui cachait la forêt d’une époque bien plus vivace et fougueuse que ses figures médiatiques, cette brochure en est un témoignage instructif, et devrait finir par convaincre celles et ceux, anti-autoritaires, qui avaient encore besoin d’éclairage pour ne pas passer àcôté des polémiques récentes mentionnées plus tôt, et trop vite qualifiées, comme tout ce que l’on ne comprend ou ne cherche pas àcomprendre (ou que l’on veut interdire de comprendre) dans ce milieu, d’« embrouilles de milieu  ».[/brun]

[sommaire]

anneesbraise.pdf (cahier)

« Nous considérons que l’heure est venue de passer de la période d’affirmation àla période d’action et de joindre àla propagande verbale et écrite dont l’inefficacité a été démontrée la propagande par le fait et l’action insurrectionnelle.  »
Congrès de l’Internationale antiautoritaire, Londres, juillet 1881

« Je ne crois pas que l’illégalisme puisse affranchir l’individu dans la société présente. Si par ce moyen il réussit às’affranchir de quelques servitudes, l’inégalité de la lutte lui en suscite d’autres encore plus lourdes, avec, au bout, la perte de la liberté, de la mince liberté dont il jouissait et, parfois, de la vie. Au fond, l’illégalisme considéré comme acte de révolte est plutôt affaire de tempérament que de doctrine. C’est pourquoi il ne peut être d’aucun effet éducatif sur l’ensemble des masses laborieuses. J’entends d’un bon effet éducatif.  »
Alexandre Marius Jacob, anarchiste, cambrioleur, ayant effectué 23 ans de bagne, déclaration du 4 septembre 1948

* * *

À l’occasion de la campagne pour la libération des membres d’Action Directe (AD), certains s’interrogent sur cette organisation anticapitaliste, ses origines, son idéologie. Quelques documents
développent ces questions, quelques versions journalistiques ou policières/étatiques, des écrits et des interviews de membres d’AD. Le manque réel de matière et d’éléments de comparaison rend difficiles la compréhension et l’appréciation de cette histoire, de ces moments de lutte.

En France, des années 1960 aux années 1980, des centaines de personnes ont répondu àla violence de l’État, du patronat, du capital, en pratiquant une violence politique lors d’actions de lutte armée.
Contrairement àl’idée véhiculée par les médias ou les romanciers, informés par la police politique, AD n’avait pas le monopole ou la direction de cette forme de lutte. Cette organisation n’était qu’une
composante de ceux (communistes, anarchistes, libertaires, révoltés sans étiquette...) qui ont commis des actes de lutte armée.

Pour ce qui est de la naissance et de la constitution de cette organisation en 1978-1979, on peut se procurer, dans les réseaux militants, deux textes qui effleurent ce sujet : « Ã‰léments chronologiques ― Action Directe  » et « Interview du collectif des prisonniers d’AD  ». Ils comportent des affirmations tant approximatives que contestables. Pour réajuster certains propos contenus dans ces textes et avant d’en citer des extraits, il est nécessaire de revenir sur cette période d’effervescence révolutionnaire que furent les années 1960-1980, sur la particularité du mouvement autonome, sur des groupes qui agissaient en France et au pied des Pyrénées des deux côtés de la frontière.

Notre souci, au travers de ce texte, est de restituer quelques fragments de ces événements et en partie le parcours des groupes évoqués par AD dans les deux textes précités, en apportant des
éclairages, en rappelant quelques faits historiques et écrits d’époque de quelques groupes autonomes.

Nous ne prétendons pas par ce document avoir rédigé l’histoire du mouvement autonome ou des groupes autonomes. Cela demanderait un travail plus important sur chaque pays, plus explicite sur le contenu idéologique de chaque tendance gravitant dans ce mouvement, plus fouillé et critique sur l’activité, sur le comportement des groupes ou individus drapés du costume révolutionnaire et armés de la critique radicale. Sans oublier d’analyser la réelle influence du mouvement et de ses idées, auprès des exploités, sur la société et sur le capital. Nous abordons ici brièvement ce passé àpartir de la fin des années 1960, en l’orientant sur l’activité et la pensée de groupes ou individus ayant
pratiqué des actions de lutte armée. Ce texte reste une contribution parcellaire. Pour enrichir le débat et transmettre ces expériences, nous souhaiterions que d’autres s’expriment sur cette période et nous fassent part de leur critique.

Du mouvement autonome et des groupes d’action

« [...] Tout au long de l’histoire de la lutte des classes, il y a des exemples de luttes autonomes. Les groupes autonomes naissent, non par décret ni par nostalgie des temps passés, mais par nécessité révolutionnaire, par la somme de nos propres vécus, de notre pratique quotidienne. La lutte révolutionnaire est jalonnée par la présence de ces groupes. [...] il y a toute une réalité pratique que nous recueillons, non pas comme une ligne ou une doctrine, mais d’un point de vue critique, comme des expériences dont il faut profiter, des moments historiques qu’il faut savoir dépasser [...]  »
Extrait de : « Le pourquoi des groupes autonomes  », signé : Groupe Autonome Incarcéré àla Modelo (prison de Barcelone) aoà»t 1978 [1], paru dans la brochure « Insurrection - organe d’expression de groupes et d’individus autonomes d’action  », publiée en France en 1979.

Présenter l’autonomie et le mouvement autonome n’est pas une chose facile. Cela peut même paraître osé, devant le risque de réduire et d’uniformiser une telle diversité.

Le terme autonomie vient du grec autos (soi-même) et nomoï (lois), autosnomos : qui se donne àsoi-même sa loi. Ce qui désigne pour un individu, un groupe ou un peuple la capacité, la liberté, d’établir ses propres règles, de se « gouverner  » soi-même.

Dans le bouillonnement de la fin des années 1960, toutes les couches de la société sont confrontées àl’idée d’une transformation radicale du monde. La révolution redevient plus qu’un possible, une évidence, une nécessité pour un grand nombre.
C’est dans ce contexte qu’apparaît au cours des années 1970, aux quatre coins de l’Europe de l’Ouest, la dénomination de mouvement ou de groupes autonomes dans les courants révolutionnaires antiparlementaires.
Le mouvement autonome, plus ou moins présent dans certains pays, n’est pas une organisation au contour bien défini. Il renvoie plus àun courant d’idées qu’àune ligne politique ou àune idéologie. Il se compose d’individus et de groupes qui se revendiquent libertaires, anarchistes, communistes, communistes libertaires, alors que certains font le rejet total de toute étiquette. Nombreux sont ceux qui ont préféré se définir par leurs actes ou leurs écrits, refusant de parler au nom des autres. Tous ont grandi dans le vivier des luttes anticapitalistes, dans le refus de toute forme d’État, de pouvoir imposé, avec l’idée d’une société générée et conduite par des assemblées de base dans les lieux de vie qui élisent lorsque cela est nécessaire des délégués (révocables àchaque instant).

Les lignes communes du mouvement sont multiples :
― réappropriation du pouvoir sur sa vie avec l’intention de vivre son quotidien (rapports sociaux, familiaux, affectifs et amoureux...) au plus près de ses aspirations et idéaux ;
― réappropriation des richesses que nous produisons (ce qui est derrière les vitrines nous appartient) ;
― refus de l’économie de profit basée sur l’exploitation de l’homme par l’homme ;
― refus des types d’organisations bureaucratiques, hiérarchisées (État, partis, syndicats...) ;
― combat contre les variantes du communisme autoritaire (Lénine, Staline, Mao...) ;
― rejet des doctrines, religions, morales ;
― remise en cause, par la critique, par la pratique, de la société
capitaliste dans ses fondements, ses formes d’organisation (argent, salariat...) et dans les modes de vie qui en découlent ;
― création d’espaces de contre-pouvoir et leur occupation par des activités socialement utiles ;
― l’internationalisme, un monde sans frontières ;
― ...

Les individus se croisent lors de manifestations ou au sein de structures associatives, économiques et politiques existantes, s’unissent au gré des affinités. Ils produisent de la réflexion, des textes, des affiches, des journaux, des brochures, éditent des livres. Ils agissent en fonction du contexte, de l’histoire du pays, de la réalité locale... Ils organisent parfois des assemblées générales pour des luttes ou des actions plus larges. Ces assemblées, ces individus, ces groupes, se définissent comme
antiautoritaires. Les décisions se prennent d’un commun accord.

Le mouvement s’attaque aux patrons, aux formes d’exploitation liées au travail, aux tenants de l’économie, aux multinationales, àla société techno-industrielle (nucléaire...), àtous les corps répressifs (armée, police, justice, administration pénitentiaire...), aux outils de contrôle social (fichage informatique, surveillance électronique...), aux organes de propagande idéologique (école, médias...), aux institutions piliers de la société capitaliste (gouvernement, partis, syndicats...), àla société patriarcale, au racisme, au fascisme, aux dictatures, au sexisme... Il développe la réappropriation d’espaces (squats, occupations diverses...), de moyens d’information (journaux, radios pirates...), du temps travaillé (refus du salariat, création de structures économiques autogérées). Il pratique les autoréductions sur le logement, les transports, l’énergie, la culture...

Au sein du mouvement, certains individus ou groupes réalisent diverses actions dont des actions armées. Elles se préparent et se réalisent en évitant toute spécialisation. Chacun recherche les moyens nécessaires àses actions et les revendique ou pas, selon les circonstances. Ces actions prennent différentes formes, différentes cibles. Elles sont variées en fonction de la particularité, de la sensibilité des individus, des groupes dans lesquels ils ou elles évoluent. Ils développent l’action directe diversifiée, du tract aux actions armées, le sabotage (àla main, avec l’allumette, au cocktail Molotov ou àla dynamite), l’affrontement et la destruction de matériel lors de manifestations, le vol ou l’expropriation (àl’étalage, en razzia, en cambriolage ou en braquage)... et, àde rares exceptions, l’exécution ciblée de personnages liés au pouvoir économique, politique, comme l’ont pratiquée certains groupes autonomes du Pays Basque « espagnol  »...

Dans le mouvement, àtravers ses moyens d’expression, le débat et la critique sont permanents, animés et virulents sur le contenu de tel texte, sur la pratique de tel individu ou tel groupe. Également autour du bien-fondé de la lutte armée, des exécutions politiques, de l’utilisation de la violence, des moyens et des formes d’action, de l’illégalisme, de l’implication dans les mouvements sociaux, du fait de se poser en avant-garde révolutionnaire... Les positions sur toutes ces questions sont diverses ; par exemple, nombreux sont ceux et celles qui rejettent les formes de lutte violentes et groupusculaires. Ils considèrent que ces actes sont suicidaires, qu’ils renforcent l’appareil d’État et qu’ils sont séparés du mouvement social réel (celui du monde du travail ?)...

En France. L’idée de révolution reprend de l’ampleur dans les années 1960, au travers de diverses luttes contre l’arme atomique, pour la décolonisation du peuple algérien ou vietnamien, dans quelques universités, dans certains lieux d’exploitation... Elle est portée par divers groupes de réflexion et d’expression théorique comme Noir et Rouge, Socialisme ou Barbarie, l’Internationale Situationniste, Informations et Correspondances Ouvrières...
En Mai 68, la révolte étudiante et le mouvement des occupations d’usines lancé par des milliers d’ouvriers (contre l’avis des directions syndicales) provoquent une grève générale illimitée. On
assiste alors :
― À une révolte sociale émancipatrice d’essence libertaire, àd’importantes manifestations, àdes barricades, àdes lancers de pavés, àdes assemblées dans les rues, àune grève générale sauvage
(illégale), qui vont éveiller de nombreuses consciences.
― À la riposte de l’État qui envoie sa police et envisage l’intervention des blindés de l’armée. Les forces de l’ordre vont réprimer violemment, bestialement, les manifestants, en interpeller des milliers et les mettre en fiche.
― Aux comportements contre-révolutionnaires des organisations de gauche (syndicats, PC et autres partis socialistes), qui oeuvrent pour le rétablissement de l’ordre et de l’État. Des organisations qui débordées dans les premières semaines reprennent possession des usines ou des électeurs. Des partis qui tentent d’orienter les révoltés vers les urnes (élections législatives de juin 1968). Des syndicats (CGT, CFDT...) qui s’emparent des seules revendications (salariales et conditions de travail) acceptables des grévistes et qui négocient des miettes aux patronats et àl’État pour remettre les exploités àla production. La base tout en conspuant les délégués syndicaux cessera le mouvement.

Ce qui s’est passé en mai préfigure l’ambiance et le niveau d’affrontement idéologique et physique des années 1970. Un État policier certes, mais surtout des organisations de gauche et des syndicats dont le seul souci est de défendre l’État, de gérer le capitalisme et de pacifier les conflits sociaux. Ce n’est pas nouveau. Mais des générations le découvrent, aux travers des luttes, àla lecture de nombreux documents critiques édités ou réédités àcette époque sur la révolution russe ou
espagnole, sur le front populaire, sur la guerre d’Algérie, sur Mai 68... Ils le vivent au fil des événements, en étant matraqués et gazés lors de manifestations par les forces de l’ordre ou par les services d’ordre du PCF (parfois de l’extrême gauche) ou de syndicats comme la CGT.
Les chefs de ces organisations justifient le maintien de l’ordre :

« Nous ne voulons pas de nouveaux mois de mai. Nous sommes prêts àfaire face àtoute aventure qui emmènerait le pays au désordre, car nous savons le prix que peuvent coà»ter àla classe ouvrière les actions irréalisables, fébriles ou romantiques.  »
Georges Séguy, secrétaire général de la CGT et membre du bureau politique du PCF, dans le Monde du 18 mai 1971.
« Je pose la question : est-ce qu’on va recommencer ànouveau comme en 1968 ? Je réponds non, cela ne doit pas recommencer.  »
Déclaration en 1973 de Georges Marchais, secrétaire général du PCF, lors des imposantes manifestations lycéennes contre la loi Debré (Michel Debré était ministre de la Défense nationale)

Après Mai 1968 et dans les années qui suivent, on peut schématiquement faire ce constat :
― Une partie de la jeunesse est dégoà»tée par l’attitude du Parti communiste français (très influent àce moment-là) qui ne cesse de dénigrer, de freiner, de combattre, l’aspect révolutionnaire de toute
révolte. Elle souhaite lutter et ne refuse pas la hiérarchie, elle va rejoindre les différentes organisations communistes d’extrême gauche, maoïstes, trotskistes, etc. Des organisations concurrentes dont l’un des rêves est de remplacer le PCF dans le coeur des masses populaires.
― Une autre partie de la jeunesse va rejoindre le courant d’idées qui prône l’autonomie des luttes et qui a été très présent au coeur de l’agitation lors des événements. Dans les années 1970-1980, on retrouve ce courant d’idées dans des groupes de quartier ou divers comités, dans quelques luttes sur les lieux de travail, au sein des tentatives communautaires (vivre autrement àla campagne et en ville), au sein de certaines universités, du mouvement antimilitariste (groupes d’insoumis ou d’objecteurs au service militaire, manifestations lycéennes et étudiantes contre la loi Debré, ou au Larzac contre l’extension du camp militaire en 1974...), du mouvement antinucléaire (groupes locaux, manifestations contre la construction de centrales dès 1971 àBugey...), du mouvement anticarcéral, du mouvement antisexiste... C’est de l’intérieur de cette mouvance critique que surgissent les groupes autonomes qui vont privilégier l’action directe et revendiquer leurs actes avec des sigles de circonstance (parfois fantaisistes).

Avant les événements de Mai 68, pendant et au cours des années qui suivent, dans cette effervescence révolutionnaire, influencés par les idées anarchistes, communistes libertaires, conseillistes, situationnistes..., des individus font connaissance et se lient d’amitié. De manière spontanée, des groupes autonomes apparaissent dans plusieurs villes de France sans que cela soit décidé par un quelconque comité central. Certains se coordonnent comme par exemple l’Union des Groupes Autonomes Libertaires (UGAL, 1970-1971)... Estimant que les manifestations, les protestations, ne suffisent pas pour contrer les projets funestes du capital, quelques-uns envisagent des actions de sabotage et n’écartent pas l’hypothèse d’utiliser les armes. C’est la continuation d’une certaine forme d’illégalisme (référence aux compagnons de la fin du xixe siècle et début du xxe) avec des expropriations et de la propagande par le fait. Après Mai 68, des premiers groupes interviennent àBordeaux et àParis. À Bordeaux, c’est un groupe de jeunes travailleurs qui est emprisonné et déféré devant la Cour de sà»reté de l’État. De juin àjuillet 1968, ils ont attaqué, avec des cocktails Molotov, une annexe de la faculté de droit, divers commissariats, un local d’un parti de droite. À Paris, en décembre 1968, un autre groupe fait exploser quelques façades d’établissements bancaires, àl’aide de charges artisanales déposées dans les boîtes aux lettres. Au début des années 1970, d’autres groupes vont se former et entrer en scène.

Dans le foisonnement des groupes actifs àcette période...

L’activité de certains groupes va permettre, lorsque la situation l’exigera ― comme l’arrestation en Espagne en septembre 1973 de membres de l’ex-Mouvement Ibérique de Libération (MIL), d’envisager une solidarité concrète et d’agir.

« Proches de l’ex-MIL, amis de Puig, les camarades directement concernés firent appel, dans le cadre de démarches d’intervention entreprises par eux, àd’autres groupes autonomes. À la suite de cette rencontre, accord se fit pour que soient mis en commun nos capacités, nos moyens. Cette
rencontre ne se fit pas par hasard ; les conflits divers qui soudent entre eux des individus les conduisent aussi àreconnaître d’autres prolétaires qui ont les mêmes intérêts. Comme nous, refusant le faux dilemme organisation bureaucratique = impuissance, ces groupes s’étaient naturellement côtoyés et avaient affirmé la possibilité d’une coordination àdéfinir concrètement.
 »
Extrait du texte « Un groupe ayant participé àla coordination GARI  », février 1975

Le MIL, dont l’activité va durer de 1971 à1973, est une organisation (non hiérarchisée) composée de communistes (tendance conseilliste) et de libertaires. Les membres sont de nationalité espagnole ou française. Ils agissent en Espagne, surtout en Catalogne, ou dans le sud de la France (Toulouse...). Sous la dictature franquiste, ils contribuent àla redynamisation d’un projet révolutionnaire. Ils écrivent et publient divers textes et réalisent quelques attaques de banques.
Le MIL s’est autodissous lors d’un « congrès  » qui s’est tenu àToulouse en aoà»t 1973 et il précise dans son texte d’autodissolution :

« ... Parler d’action armée et de préparation àl’insurrection est la même chose : il est maintenant inutile de parler d’organisation politico-militaire ; de telles organisations ne sont que d’autres déchets politiques. Pour toutes ces raisons, le MIL s’autodissout comme organisation politico-militaire et ses membres se disposent àassumer l’approfondissement des perspectives communistes du mouvement social.  » Il faut préciser que dans le post-scriptum certaines formes d’action, dont le sabotage, n’étaient pas exclues et il est écrit : « ... L’organisation est l’organisation des tâches, c’est pourquoi il est nécessaire que les groupes se coordonnent pour l’action. À partir de telles constatations, l’organisation, la politique, le militantisme, le moralisme, les martyrs, les sigles, notre propre étiquette, font partie du vieux monde.  »

Si le MIL a cessé d’exister en tant qu’organisation, les individus l’ayant composé vont continuer le combat. En septembre 1973, en Espagne, àla suite de l’attaque àmain armée d’une banque, deux
auteurs (ex-MIL) sont appréhendés par la Guardia Civil. Cela va entraîner, en Catalogne, une série d’arrestations de membres de l’ex-MIL. Le 8 janvier 1974, l’un d’entre eux, Puig Antich, est doublement condamné àmort pour sa participation àune fusillade avec les forces de l’ordre lors d’une attaque àmain armée revendiquée par le MIL et pour avoir mortellement blessé par balles un inspecteur de la police politique, lors de son arrestation.

En janvier 1974, une coordination de groupes composée pour l’essentiel d’ex-MIL, de libertaires français ou espagnols se met en place. Pour tenter de bloquer l’exécution de Puig, l’enlèvement d’une personnalité espagnole est au programme. À la suite d’arrestations, l’action est retardée et, malheureusement, le 2 mars 1974 dans la cour de la prison de la Modelo àBarcelone, Puig Antich est garrotté (un collier de fer serré par une vis étrangle la victime tout en lui broyant les vertèbres
cervicales). Deux autres membres de l’ex-MIL risquent àleur tour la peine de mort lors d’un prochain procès (ils seront finalement condamnés àdes peines de prison en juillet 1974). Pour ces interventions, cette coordination va prendre pour sigle GAI (Groupes Autonomes d’Intervention)
et devenir par la suite GARI (Groupes d’Action Révolutionnaire Internationalistes).
Les GAI effectuent le 22 mars 1974, dans le sud de la France, une série de sabotages àl’explosif sur des voies de communication (ponts et voies ferrées) allant vers l’Espagne. Ils la revendiquent comme suit :

« ... Nous ne sommes pas la branche militaire d’un parti, ni des terroristes ou des militants professionnels, mais des individus qui savent que la révolution est avant tout sociale et qui refusent le système làoù ils travaillent et làoù ils vivent. En gênant les communications entre la France et l’Espagne, nous intervenons sur les échanges économiques entre les classes capitalistes des deux pays d’une façon partielle et momentanée, persuadés que les prolétaires peuvent arrêter la production d’une façon durable et efficace sur les lieux de travail, pour leur propre émancipation... Des prolétaires qui sont condamnés àêtre des objets sans passion, àse prostituer pour survivre avant d’être tués sans éclat sur les lieux de leur travail... Protester contre les gouvernements libéraux, démocrates ou « socialistes  » qui brandissent le symbole de l’Espagne dictatoriale pour prouver qu’ils sont libres et humains, contre les démocrates et gauchistes qui hurlent au crime quand Puig Antich est assassiné et crierait victoire si on lui avait permis de crever àpetit feu entre quatre murs et se taisent alors que Pons et Solé risquent la peine de mort, et passent sous silence que onze membres du MIL, dont deux en France, risquent de lourdes peines... Seule une action révolutionnaire doit-être actuellement menée...  »

Les GARI défraient la chronique en mai 1974 en kidnappant àParis B. Suarez (directeur de la Banco Bilbao) et commettent divers attentats en juillet et aoà»t pour exiger entre autres la libération des ex-MIL et empêcher de nouvelles condamnations àmort. De mai àdécembre 1974, àParis, Avignon, au Pays Basque français et en Haute-Garonne, des membres de cette coordination sont arrêtés et emprisonnés.

«  Nous ne sommes ni l’avant-garde du prolétariat ni le parti révolutionnaire. Nous ne représentons que nous-mêmes. Nous sommes nous-mêmes, rouages d’une société qui nous exploite et nous opprime et nous voulons VIVRE ET COMPRENDRE.
Et l’essentiel de notre carrière c’est d’avoir tenté de VIVRE en essayant de changer dans notre vie quotidienne les rapports stéréotypés, hiérarchisés, artificiels entre individus. Cela nous a conduits àune tentative de compréhension plus large de notre situation dans la société.
Cela nous a conduits àlutter contre tout ce qui nous aliène (le capital, son État tentaculaire, et tout ce qui lui est soumis : partis et groupuscules politiques, bureaucraties syndicales, etc.). Cela nous a également conduits àessayer réellement de secourir les amis menacés de mort en employant exceptionnellement des moyens particuliers correspondant àcette situation concrète (et non dans l’intention de privilégier àl’avenir et dans l’absolu ce genre de méthode).
 »
Extrait d’un texte de novembre 1974, signé « Les dynamiteurs basques  », un groupe du Pays Basque nord ayant participé àla coordination des GARI, dont deux membres croupissaient àce moment-lààla prison de la Santé àParis (Le groupe n’avait pas de nom particulier, la signature est en référence au titre de l’article du journal Sud-Ouest qui relatait leur arrestation.)

Les GARI n’ont pas été démantelés par la répression, ils se sont autodissous fin aoà»t 1974. À partir de cette date, aucune action n’est revendiquée GARI. Le sigle va perdurer dans les médias àcause de l’incarcération de quelques membres. L’autodissolution était prévue dès la constitution du groupe et il n’a jamais été question de créer une organisation de lutte armée. Un texte de février 1975 signé « Un groupe ayant participé àla coordination GARI  » en donne les raisons.

« ... Nous ne voulons pas ici perpétuer un sigle, un moment de lutte. Ce serait faire le contraire de ce que nous pensons. Parce qu’une lutte n’a ni début ni fin, parce qu’une révolution n’a ni début ni fin, hormis pour qui détermine le temps en fonction de son accession au pouvoir. Parce que tout nous démontre qu’une organisation qui se fige finit par avoir trop de choses àperdre : un sigle, une représentation, pour être vraiment un moyen de lutte ; elle devient fin en soi, se veut un interlocuteur valable, et cela contre ceux qui refusent ses tactiques politiciennes, frontistes. Contre les prolétaires eux-mêmes, tous devenus provocateurs, délinquants... les GARl, n’existent plus comme coordination de groupes. Demain, une autre coordination se fera sur d’autres objectifs ou sur les mêmes ; avec d’autres groupes autonomes ou avec les mêmes. D’autres sigles se feront jour, puis disparaîtront. Pour nous, la véritable constante c’est le groupe autonome, constitué de prolétaires réunis sur labase d’une affinité réelle, ayant l’habitude de vivre, de lutter, de discuter, de critiquer ensemble. Les accords provisoires contractés avec d’autres groupes sont pour nous une des conditions essentielles pour éviter le militantisme et la bureaucratie, pour éviter que les gens se déresponsabilisent individuellement et collectivement au sein d’une structure figée, sécurisante.
Nous connaissons trop le rôle des bureaux politiques, d’une organisation, d’une fédération, d’un groupuscule, pour nous fier àune coordination permanente. Quand la base s’est donné une représentation permanente, parti, fédération, syndicat, coordination, la bureaucratie s’installe,
chefs, délégués, permanents, se créent, sécrétés par un appareil dont l’épaisseur inerte nécessite une division de tâches. Ces tâches deviennent spécialisation. Cette spécialisation devient hiérarchie de fait...
 »

En 1975 et 1976, d’autres groupes se manifestent, àParis, dans le centre ou dans le sud de la France et revendiquent des actions de sabotage coordonnées ou pas. C’est àcette époque que les organisations d’extrême gauche, en perte d’effectif, disparaissent ou perdent de l’influence,
notamment au sein des facultés, et que des individus et des groupes provenant de ces organisations se joignent àla sphère du courant autonome. C’est le cas des NAPAP (Noyaux Armés Pour l’Autonomie Prolétarienne) organisation en rupture avec le courant maoïste comme ils le précisent en octobre 1977 :

« ... Nous n’avons plus rien àvoir avec l’étiquette maoïste que la presse nous a collée. S’il est vrai que d’anciens maos appartiennent aux NAPAP, ce n’est pas seulement àpartir du bilan de la liquidation de la Gauche Prolétarienne ou de Vive la Révolution que nous nous sommes formés...
Il est clair que nous ne sommes ni le parti combattant de quoi que ce soit, encore moins une nouvelle bande àBaader. Nous avons tiré le bilan des pratiques politico-militaires étrangères qui mènent des combattants “spécialistes†àune lutte solidaire et suicidaire face àl’appareil d’État moderne. Notre pratique s’inscrit dans l’édification de l’autonomie ouvrière organisée au sein du mouvement populaire. Notre but n’est pas d’appeler àla formation de 1, 10, 100 NAPAP régis par une direction centrale style état-major de la violence populaire potentielle. Nous abordons une autre étape qui consiste ànous fondre dans la dynamique du mouvement et non pas àchercher àen prendre la tête d’une façon officielle ou magouillarde...
 »
Extrait du « Texte de mise au point des NAPAP », octobre 1977

En 1977, la seule année de leur activité, les NAPAP revendiquent divers attentats et sabotages, ainsi que, le 24 mars, l’exécution de Jean-AntoineTramoni. En février 1972, àl’entrée de l’usine Renault de Billancourt, lors d’un affrontement entre des militants de la Gauche Prolétarienne [2] et des vigiles de l’entreprise, le vigile Tramoni a tiré et abattu Pierre Overney. Pour cet assassinat Tramoni est condamné par la justice française àquatre ans de prison ferme et libéré au bout de dix-huit mois.

De la coordination CARLOS àla naissance d’Action Directe

En mai 1977, les trois derniers emprisonnés ayant participé aux interventions signées GARI, sont libérés. Ils vont réintégrer les groupes autonomes et, par làmême, un des réseaux libertaires existants. Leur incarcération àla prison de la Santé leur a « permis  » de prendre contact avec des groupes communistes proches de l’autonomie parisienne. À partir de là, ce réseau libertaire et ces courants politiques communistes vont plus ou moins se côtoyer et s’entraider, sans pour cela que tous les points de vue politiques soient vraiment abordés, échangés ou approfondis. Toutefois, cet acquis relationnel se concrétise par « la nuit bleue antinucléaire  » du 19 novembre 1977, une série d’attentats àl’aide d’explosifs dans diverses villes visant entre autres des structures d’EDF. Ces destructions sont revendiquées par CARLOS (Coordination Autonome des Révoltés en Lutte Ouverte contre la Société). Cette coordination CARLOS est composée de groupes et d’individus autonomes, libertaires ou d’obédience communiste révolutionnaire (ex-membres de la Gauche prolétarienne, ex-NAPAP ou de la mouvance de l’autonomie parisienne, issue du courant Camarades)... Cette intervention ne se situe pas seulement dans un registre antinucléaire mais dans une lutte anticapitaliste comme on peut le constater en lisant le communiqué.

« Le développement forcené actuel de l’énergie nucléaire est un choix irréversible que le capitalisme nous impose. De par son fonctionnement, sa nature, l’énergie nucléaire est la caricature d’un univers hiérarchisé, technocratisé, militarisé, où nous n’intervenons en rien. L’État ne respecte même plus sa propre légalité pour la construction des centrales nucléaires, l’ouverture des mines d’uranium, l’extension des usines de retraitement des déchets, etc. Le choix de l’énergie nucléaire, de par la concentration des moyens économiques, technologiques, humains, est l’occasion rêvée pour le capitalisme de pérenniser sa domination sur nos vies. Une centrale nucléaire, une fois construite, ne peut être détruite avant 20 ans. C’est ici qu’un moratoire limité apparaît clairement comme démagogique. La valse hésitation du PS est bien dans la lignée récupératrice, démagogique, de ce parti attrape-tout. Refuser l’énergie nucléaire serait remettre en cause radicalement le capitalisme, ce qui fait sourire quand on voit la bousculade des cadres socialistes, dans la débandade forcenée de leur appétit de pouvoir. Ne nous trompons pas : nous aurons une bombe àgauche, une énergie nucléaire àgauche, avec des flics de gauche et des enterrements démocratiques. Quant au PC, avec ses vues totalitaires et bureaucratiques, il ne peut que cautionner le développement d’une énergie nucléaire dont il aurait le contrôle.
Par ailleurs, le développement actuel des recherches sur l’énergie solaire, s’orientant vers de grosses unités de production, montre que l’intérêt du capital réside dans la concentration de l’énergie, pour garder le contrôle de sa redistribution. La lutte contre le développement de l’énergie nucléaire ne peut se cantonner dans l’opposition légaliste des partis et syndicats. De même, il est évident que les manifestations antinucléaires et écologiques ont révélé l’existence d’une contestation profonde de cette société sur les bases d’un refus de tout centralisme, toute hiérarchie, contre le travail salarié et la consommation àoutrance, ces rassemblements ne peuvent suffire àstopper le pouvoir. Il est indispensable d’intensifier les actions de sabotage qui touchent directement le pouvoir dans ses intérêts économiques et permettent de retarder, voire de stopper la construction des centrales, mines, usines liées au nucléaire. Quoi qu’il en soit, le nucléaire n’est qu’un des aspects les plus apparents de l’exploitation généralisée du capitalisme qui ne peut être mis en échec que par l’auto-organisation des individus et par la prise en main de tous les aspects de notre vie quotidienne.
 »
Communiqué signé CARLOS (Libération du 22 novembre 1977)

Précisons que les groupes agissant àce moment-làen France n’ont pas tous accepté de prendre part àcette soirée ou connu l’existence du projet de cette « nuit bleue  ». Ce qui veut dire que la
coordination CARLOS ne regroupait pas l’ensemble des groupes libertaires ou autres qui pratiquaient en France des actes de lutte armée. Pour des raisons de sécurité ou de clandestinité, tous les groupes ayant ce type d’activités ne se connaissaient pas ou ne souhaitaient pas se connaître. La pratique d’actions illégales entraîne certaines mesures de sécurité, la discrétion, le cloisonnement entre groupes... N’oublions pas que la répression est omniprésente ― filatures, écoutes téléphoniques, vols de courrier, intimidations diverses, perquisitions, interrogatoires, sévices, incarcérations, enlèvements de militants par la police politique (dans les années 1980, àBordeaux,
Lyon, Toulouse, Paris...) ― pour obtenir sous la pression des informations sur des personnes recherchées ou responsables d’actions de lutte armée.

La fin de l’été 1978 marque la rupture entre divers groupes autonomes présents au sein de ce réseau coordination CARLOS.
Certains, enthousiasmés par la « puissance de feu  » des groupes autonomes, par un mouvement social qui localement (les mineurs et les sidérurgistes àDenain, Longwy...) réagit violemment aux restructurations capitalistes, pensent que la période est favorable pour radicaliser et structurer le mouvement. Ils décident la constitution d’une organisation armée. Ils veulent passer àun niveau supérieur d’affrontement qui suppose aussi des exécutions ciblées comme le pratiquent certaines organisations de lutte armée en Allemagne, en Italie ou en Espagne. C’est de ce courant que va naître l’organisation Action Directe.
Les autres groupes refusent l’organisation pour diverses raisons. Tous les individus n’ont pas la même analyse de la situation, la même conception, la même stratégie sur le combat àmener. Concevoir une organisation permanente qui s’affirme en guerre contre l’État va àcontre-courant de leur pensée et de leur mode d’organisation. Ils restent sur des bases mouvementistes et assembléistes. L’organisation rompt avec la pratique de groupes issus de mouvements diffus, organisés de manière horizontale. Ils sont pour la multiplication des groupes affinitaires où les individus du groupe décident en assemblée de leur propre action et limitent ainsi les possibilités d’infiltration policière. La permanence d’un sigle, en plus d’attirer la répression, permet àla justice, en cas d’arrestation, d’accumuler les charges (le dossier pénal des GARI en était la démonstration). Ces groupes sont déjàtrès critiques sur les orientations avant-gardistes des organisations marxistes-léninistes de lutte armée style Brigades Rouges (Italie), Rote Armee Fraktion (Allemagne). Ils s’opposent àl’hégémonie de ce type d’organisation sur le mouvement. Ils sont conscients que ce
n’est pas en tuant des tenants du capital qu’un contre-pouvoir peut gagner du terrain et faire lever un mouvement social. Le capital se fout que l’un de ses serviteurs soit exécuté. Pour lui, les hommes ne comptent pas, mais par contre le sabotage de l’outil de travail qui bloque la production lui fait perdre du temps et de l’argent. Une transformation sociale ne peut reposer sur la seule utilisation des armes et des explosifs. La lutte armée ou les actions armées ne sont pas une finalité, les formes d’intervention sont (et seront) multiples et variées. Créer une armée, qu’elle soit rouge ou noire, induit une clandestinité permanente et le repli sur cette seule forme de lutte.

Action Directe va apparaître médiatiquement le 1er mai 1979 en revendiquant une série d’attentats àParis, puis va poursuivre sa route, commettre d’autres attentats. L’organisation va s’allier avec la Rote Armee Fraktion (RAF) àpartir de 1985... En France, elle va tenter d’exécuter, en 1985, le général Blandin, contrôleur général des armées, et, en 1986, le pdg de la branche armement de l’entreprise Thomson, Guy Brana. Elle va abattre, en 1985, le général Audran, l’un des responsables
au ministère de la Défense des affaires internationales, dont les ventes d’armes... et, en 1986, Georges Besse, pdg de Renault.
Les groupes autonomes vont, eux, perpétrer divers attentats ou sabotages et organiser de nouvelles coordinations qui agiront àla fin des années 1970, notamment en 1978 et 1979, en solidarité avec des autonomes libertaires incarcérés en Espagne et pendant les années 1980 sur le terrain anticarcéral, antinucléaire (sur ce thème, voir Golfech, le nucléaire : implantation et résistances, édité par le CRAS en 1999)...

Depuis l’année 1968, des centaines d’actions de lutte armée ont été revendiquées ou pas par les groupes autonomes. À notre connaissance, aucune exécution de personne n’a eu lieu, excepté l’acte de l’anarchiste autonome Jean Bilski. Le 14 mai 1976, àParis, Bilski armé d’un P38 abat Jacques Chaine, pdg du Crédit Lyonnais et se suicide immédiatement après avec la même arme.

La constitution de l’organisation Action Directe vu par Action Directe

Voici les extraits de deux textes émanant d’Action Directe qui abordent la genèse de l’organisation. Ils nécessitent quelques mises au point. Le contenu de ces textes est intéressant ; ceux qui souhaitent en savoir plus sur cette organisation peuvent se renseigner et éventuellement se procurer ces documents aux adresses indiquées en fin de document.

Le premier est un extrait d’« Ã‰léments chronologiques ― Action Directe  » paru dans Cahier Front, n° 6, non daté mais vraisemblablement publié vers la fin des années 1990.

« 1977-1978 : L’année 1977 est marquée par l’émergence du mouvement autonome européen et par sa liaison avec les offensives de la guérilla en Allemagne et en Italie. En France, des militants révolutionnaires issus de nombreuses et diverses expériences françaises et étrangères, depuis 1968, initient un processus pratique de convergence. Et ils établissent une coordination politico-militaire, interne au mouvement autonome. Dans cette coordination se retrouvent ainsi d’anciens membres de groupes armés, de la résistance antifranquiste ― MIL (Mouvement Ibérique de Libération) et GARI (Groupes d’Action Révolutionnaire Internationalistes) ―, des membres de groupes autonomes nés après la dissolution de la Gauche Prolétarienne, comme les Noyaux Armés Pour l’Autonomie Prolétarienne, mais aussi de nombreux militants ayant rompu avec les politiques légalistes et parasyndicales de l’extrême-gauche groupusculaire. Durant près de deux ans, cette coordination mènera de nombreuses actions de sabotage et de préparation àla lutte armée. Des nuits bleues comme celle contre la construction de la centrale de Malville, 23 attentats sur tout le territoire revendiqués carlos (Coordination Autonome Radicalement en Lutte Ouverte contre la Société). Une nuit bleue en riposte àl’extradition de Klaus Croissant vers l’Allemagne et de nombreuses actions après l’assassinat dans leurs cellules des camarades de la RAF Andreas, Gundrun et Karl... mais aussi des actions contre les nouveaux négriers et la flexibilisation du travail, telles les opérations de la CACT (Coordination Autonome Contre le Travail) àToulouse contre les ANPE et les agences d’intérim...
1979 : Au cours de l’hiver 1978-1979, la coordination décide de faire le saut àl’organisation de guérilla. Le 1er Mai, elle scelle cette détermination en attaquant les armes àla main le siège du patronat (CNPF, Conseil National du Patronat Français).
Action Directe n’est pas apparue par génération spontanée. Des individus ou des groupes ayant eu des expériences diverses de propagande armée ont ressenti la nécessité, au-delàd’actions
ponctuelles ou de campagnes politiques (comme en 1977...), de se donner un instrument afin de promouvoir une stratégie communiste...
 »

Le second est un extrait d’« Interview du collectif des prisonniers d’AD », publié en 2001 sous forme de brochure par Anarchist Black Cross de Gand (Belgique) qui a réalisé cette interview entre le printemps 1999 et l’été 2000. Vingt questions sont posées au « Collectif des prisonniers d’AD  ». Dans la formulation de la première question, il est affirmé que le MIL et les GARI sont présents lors de la constitution d’AD. Dans sa réponse le collectif confirme.

Anarchist Black Cross de Gand (Belgique) : « Avant d’entrer dans l’histoire d’AD propre, nous voudrions parler de la « préhistoire  » d’AD. Préhistoire qui est restée largement sinon non écrite en tout cas méconnue et donc assez importante en soi. Préhistoire qui est d’ailleurs, ànotre avis, aussi importante pour comprendre l’histoire interne d’AD. Donc, AD est née, en 1979, d’une coordination de différents groupes armés, comme le MIL, les GARI, les BI ou les NAPAP, dans un temps marqué par l’autonomie. Pourriez-vous en dire plus sur ces groupes et sur la coordination autonome elle-même ?  »
Collectif des prisonniers : « Depuis le début des années 1970, de nombreux groupes tentaient de résoudre dans la pratique la question de la contre-violence révolutionnaire, agissaient sur la lancée du mouvement des barricades, des occupations d’usines, des luttes àla base... Constitués en
réseaux d’autodéfense, ils portaient toute la résolution de l’illégalisme de masse dans les grandes mobilisations qui se sont succédé lors de ses années d’effervescence antagoniste. Concrètement, ces réseaux formaient ce que la GP (Gauche Prolétarienne), àson époque, avait appelé de tous ses voeux : les bases de la résistance populaire armée àla dictature. Au printemps 1977, la coordination autonome, en se formant, dépassa le cadre groupusculaire gauchiste. En particulier, elle sortait des clivages idéologiques pour unifier sur le terrain des luttes clandestines, la tendance mao, àcelle surgie de Mai, faite d’une mosaïque de groupes anar, anarco-communistes, d’ultra-gauche, clandestins ou non. Il y avait donc làdes groupes armés mao comme les Brigades Internationales, des autonomes tels les Noyaux Armés Pour l’Autonomie Populaire ou encore l’organisation Camarades et l’ancienne coordination antifranquiste des groupes autonomes qui formaient les MIL-GARI (Movimiento Ibérico de Liberación et Grupos de Acción Revolucionaria Internationalistas)...
 »

Mise au point

Nous ne pouvons partager l’interprétation que fait Action Directe des événements qui se sont déroulés au cours des années 1977, 1978 et 1979. AD est née d’une coordination d’individus et de différents groupes armés dont la plupart sont issus de la mouvance autonome. Cela personne ne peut
le contester, même G. Debord qui affirmait dans la préface d’Appels de la prison de Ségovie, Champs Libres, 1980, que cette organisation était une émanation de l’État. Mais, on ne peut mêler àla création d’AD, le MIL et les GARI (comme il est dit dans l’interview réalisée par ABC Gand). On en voit les raisons idéologiques dans notre document avec en particulier l’autodissolution du MIL et des GARI en aoà»t 1973 et 1974. Que des individus aient traversé certaines de ces expériences (MIL et GARI) et participent àla constitution d’AD c’est indéniable ! C’est le cas de l’un d’entre eux. À la création d’AD, il n’y a qu’une personne de l’ex-MIL. Combien de membres de l’ex-GARI ? Deux, trois ?
Dans la « coordination  », que nous appelons plutôt réseau, de 1977-1978, il y avait plusieurs ex-MIL et ex-GARI, mais tous n’ont pas souhaité prendre part àla création de cette organisation. Ce n’est pas la coordination qui décide de créer AD, mais certains groupes et individus présents dans cette coordination.
AD affirme àtort : « ... Au fil des mois, les groupes armés ont convergé dans l’élan du mouvement autonome qui avait la coordination pour épine dorsale. Puis ils s’en sont lentement détachés pour assurer leur véritable rôle comme organisation de guérilla...  » (p.7 et 8 de la brochure « Interview du collectif des prisonniers d’AD  ») ou « ... la coordination décide de faire le saut àl’organisation.  » (« Ã‰léments chronologiques ― Action Directe  ») puisqu’un certain nombre de groupes et d’individus ayant agi dans cette coordination réseau ne vont pas participer àl’activité d’AD.
En ce qui concerne les membres des BI [3], des NAPAP et autres protagonistes qui auraient été présents àla constitution d’AD, c’est àeux d’en parler et d’éclairer le mouvement sur leur position.

Quand AD présente ou sous-entend la « coordination  » comme une organisation structurée, c’est un peu rapide. Rassembler tous ces groupes ou individus qui étaient en contact sous le label « 
coordination  » est contestable. Pour certains de ceux qui ont formé AD c’est une coordination politico-militaire (« Ã‰léments chronologiques...  »). Cette formulation (marxiste-léniniste) laisse entendre que l’organisation est déjàen place. Pour nous, c’étaient des relations inter-groupes (autonomes de pensée et d’action). La coordination n’a pas été une organisation armée traduisant en actes les aspirations d’une mouvance ou d’un appareil politico-militaire structuré au sein du mouvement autonome. Même si quelques individus se réunissant àParis ont tenté durant cette
période de le mettre en place. Ce n’est pas facile de militariser des libertaires.

Quand AD écrit : « Durant près de deux ans, cette coordination mènera de nombreuses actions de sabotage et de préparation àla lutte armée. Des nuits bleues...  » (« Ã‰léments chronologiques...  »), ce n’est pas tout àfait exact. Cette « coordination  » ne va pas durer « près de deux ans  », mais « Ã©clater  » au bout d’un an àla suite des désaccords concernant la création d’une organisation armée. Et sans que pour cela leurs actes soient décidés par un quelconque appareil « politico-militaire  », des groupes et individus reliés àcette coordination réseau vont commettre en octobre et novembre 1977 divers attentats contre des objectifs liés àl’économie allemande en réponse aux « assassinats/suicides  » d’Andreas Baader, Jan Carl Raspe et Gudrun Ensslin, membres de la RAF incarcérés àla prison de Stammheim/Stuttgart (Allemagne). Quant àla nuit bleue contre l’extradition de l’avocat allemand Klaus Croissant, nous n’en avons pas connaissance, bien qu’il y ait eu beaucoup d’actions de solidarité. Par contre, en novembre 1977, ce réseau va être àl’origine de la nuit bleue antinucléaire revendiquée CARLOS. Actions pas seulement contre la centrale de Malville, comme il est écrit dans « Ã‰léments chronologiques...  ». La coordination n’est pas àl’origine des sept attentats àl’explosif commis àToulouse, dans la nuit du 4 au 5 mars 1978 contre des ANPE et des agences d’intérim. Il s’agit d’une coordination toulousaine de divers groupes dont certains avaient participé àla soirée CARLOS.
Au cours de ces années on ne peut parler d’une coordination, mais de plusieurs réseaux où chaque groupe (ou individu) a ses propres contacts en fonction de ses affinités... On peut percevoir cela comme des cercles qui parfois s’entrelacent.

AD ne peut réduire l’activité du MIL et des GARI àde la « résistance antifranquiste  » (voir « Ã‰léments chronologiques...  ») :
« Le MIL n’est pas né de la volonté de lutter contre le franquisme car la dictature n’en fut pas le détonateur. L’objet de sa lutte était le capital, sous tous ses aspects.  »
Santi Soler, membre de l’ex-MIL, mars 1985
« ... notre combat n’est pas politique mais bien plus total global. Nous ne luttons pas seulement contre le franquisme, contre le fascisme, qui ne sont que des formes du capital, mais contre le capital lui-même qui domine la France démocratique comme l’Espagne fasciste... Et si les attentats commis n’ont pas fait de victimes c’est que nous avons pris les précautions nécessaires. Nous agissions pour tenter de sauver des vies humaines non pour tuer...  »
Extrait d’un texte de novembre 1974, signé « Les dynamiteurs basques  », un groupe du Pays Basque nord ayant participé àla coordination des GARI

D’hier àaujourd’hui

Actuellement, sur Action Directe, nous n’avons connaissance que de la situation pénale, des conditions de détention et de l’état de santé des membres incarcérés. Depuis 1987, aucune action de lutte armée n’a été revendiquée par AD.

« Notre arrestation en 1987 faisait suite àd’autres. Elle mit fin àl’activité politico-militaire de notre organisation. Depuis nous nous efforçons àtravailler politiquement malgré les conditions, nous discutons par écrit avec d’autres prisonniers révolutionnaires, nous participons àune publication (Front), aussi en traduisant des textes de discussions ou d’actions, en particulier du mouvement révolutionnaire européen. Le sens reste de ne renoncer àrien du combat nous ayant conduit ici : À travers un processus de guerre révolutionnaire prolongée, penser nécessaire et possible la révolution des Conseils mettant en place de nouveaux modes d’organisation sociale et politique...  »
Extrait d’un texte de 1997 rédigé par des prisonniers d’Action Directe

Nous avons vu, que de multiples groupes autonomes pratiquant des actes de lutte armée se sont constitués depuis 1968. Certains se sont évaporés après une courte existence, le temps d’une ou deux actions. Quelques-uns ont duré plusieurs années. On peut vérifier qu’àla fin des années 1980
l’activité des groupes d’action armée est en nette régression. Pour connaître les raisons de leur silence, il faudrait poser la question àdes centaines d’actrices et d’acteurs, clandestins àl’époque, et que nous ne connaissons toujours pas aujourd’hui. Chaque groupe a sa propre histoire ; contrairement àla légende, elles ne sont pas toujours liées àla répression. On ne peut nier que des groupes ont été démantelés par les services de la gendarmerie ou de la police, que les arrestations et
l’enfermement ont détruit des relations affinitaires ou brisé des individus... Mais bien que nous soyons nombreux àavoir franchi les portes des prisons, d’autres ont su ou ont pu les éviter. Par exemple, personne n’a été arrêté pour les multiples actions explosives revendiquées par les groupes suivants qui ont utilisé plusieurs fois le même sigle : Solidarité Révolutionnaire Internationale (1975-1977), Gdansk-Bakounine (1981-1983), Groupes d’Action Anarchiste (Toulouse 1982-1983), CLODO, alias Comité Liquidant et Détournant les Ordinateurs (région toulousaine, 1980-1984), Géronimo (région parisienne, 1982-1985), Black War (région parisienne, 1985-1988)), Gracchus Babeuf (région parisienne, 1989-1990)...
L’amitié, l’affinité politique, le plaisir àl’action, la complicité, parfois la mise en commun des moyens de survie, sont les carburants d’un groupe affinitaire, de réflexion, d’action, voire d’action armée. Lorsque ses éléments ne s’emboîtent plus, pour cause de séparations affectives, de désaccords politiques, de retour au salariat, de repli sur la famille, de révolte qui s’émousse, d’usure psychologique provoquée par le combat clandestin..., le groupe réduit ses activités ou disparaît. Nous pourrions parler àce sujet de notre propre expérience. L’éclipse de ces groupes est donc due àde multiples facteurs : àl’absence de mouvements sociaux radicaux ; au déclin de la période révolutionnaire que certains situent en 1973, d’autres en 1977 ou au début des années 1980 ; àla situation politique, bien sà»r.
La fin des années 1980 et les années 1990 sont marquées par l’apparition d’une violence menée par des intégristes islamiques (soutenus par des États) qui permet aux tenants de l’ordre social de faire l’amalgame entre un acte lié àla lutte des classes et celui qui vise n’importe quel individu, n’importe quelle foule (terrorisme aveugle). Cette situation a amené les groupes en activité ou en formation àtenir compte de ce piège et àrepenser leur forme d’intervention.

Aujourd’hui, en ce début de siècle, nous constatons que les individus et groupes autonomes continuent àagir et que ce courant anti-capitaliste n’a pas été éradiqué. Il existe toujours diverses structures autonomes de réflexion et d’action. L’activité des groupes autonomes pratiquant des
actes de lutte armée est quasiment inexistante (àdes degrés moindres dans le reste de l’Europe). Mais des actes de résistance offensive ont toujours lieu dans plusieurs pays européens : interventions contre la société marchande, contre les dirigeants du monde, contre la société
techno-scientiste-industrielle (saccages de cultures OGM, actions antinucléaires...), contre la répression et ses structures (actions anticarcérales...).

Pour un monde sans classes sociales et un bonheur sans fin.

Collectif éphémère, mars 2005

* * *

Solidarité

Inhumaine, la prison est un outil de répression sociale au service des dominants. Elle enferme principalement les pauvres et les révoltés. L’un des points du programme révolutionnaire est sa destruction et, ainsi, la libération de tous les prisonniers, hommes, femmes et enfants. Ce point n’a pas l’assentiment de tous, nous savons que ce n’est pas demain la veille qu’il sera appliqué, mais il reste l’un des fondements de notre utopie. Dans un premier temps, nous soutenons les
revendications des prisonniers, abolition de l’isolement, des longues peines, libération immédiate des détenus malades et de tous ceux qui peuvent bénéficier d’une libération conditionnelle...

Situation pénale des membres ou ex-membres d’AD encore incarcérés
Arrêté le 15 mars 1984, Régis Schleicher (détenu àla centrale de Clairvaux, Aube) a été jugé àdiverses reprises en 1987 et 1988, et condamné àla réclusion criminelle àperpétuité assortie d’une peine de sà»reté de 15 ans. Il a droit àla liberté conditionnelle depuis l’automne 1999.
Arrêtés le 21 février 1987, Jean-Marc Rouillan (détenu àla centrale de Lannemezan, Hautes-Pyrénées), Georges Cipriani (détenu àla centrale d’Ensisheim, Haut-Rhin), Nathalie Ménigon (détenue àla centrale de Bapaume, Pas-de-Calais) ont été tous les trois, après divers procès,
condamnés àla réclusion criminelle àperpétuité assortie d’une peine de sà»reté de 18 ans. Ils ont droit àla liberté conditionnelle depuis février 2005.
Arrêtée le 21 février 1987, Joë lle Aubron, condamnée aux mêmes peines, a été libérée le 14 juin 2004 pour raison médicale. [ Elle est décédé le mercredi 1er mars 2006. ]

Ceux de « L’affiche rouge  » et de la « branche lyonnaise d’AD  » [NdNF : Groupe antisémite]
Ce groupe est issu de l’une des scissions survenues au début des années 80 au sein d’AD. Dans un premier temps, le groupe va revendiquer ses interventions au nom de « l’Affiche rouge  » ; puis, quelques années plus tard, sans renouer avec AD, il va de nouveau signer AD.
Arrêté le 10 octobre 1984, Émile Ballandras (détenu àla centrale de Clairvaux, Aube) a été condamné àla réclusion criminelle àperpétuité assortie d’une peine de sà»reté de 16 ans. Il a droit àla liberté conditionnelle depuis 2000.
Arrêté le 28 mars 1986, André Olivier (détenu àla centrale de Saint-Maur, Indre) a été condamné àla réclusion criminelle àperpétuité assortie d’une peine de sà»reté de 18 ans. Il a droit àla liberté conditionnelle depuis 2004.
Arrêté le 28 novembre 1987, Max Frérot a été condamné àla réclusion criminelle àperpétuité assortie d’une peine de sà»reté de 18 ans. Il aura droit àla liberté conditionnelle fin 2005.


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[1En janvier 1978, ils sont quatre, hommes et femmes, de ce groupe libertaire de Barcelone, àêtre incarcérés et inculpés d’attaques àmain armée et d’attentats àl’explosif contre des édifices publics. Au cours de la même année en Espagne, plusieurs groupes autonomes pratiquant la lutte armée sont atteints par la répression (voir Appels de la prison de Ségovie, Champs Libres, 1980).

[2La Gauche Prolétarienne (GP) est une organisation politico-militaire communiste, de tendance maoïste, créée en 1969. Elle s’autodissout en 1973. Au cours de ces années, elle va pratiquer des actions de lutte armée et, en 1970, elle crée son bras armé la Nouvelle Résistance Populaire (NRP).

[3Les Brigades Internationales sont une organisation communiste de tendance marxiste-léniniste, créée en 1973, après le coup d’État militaire au Chili. La plupart de ses membres proviennent de la Gauche Prolétarienne. De 1974 à1977, les BI vont se concentrer sur la situation internationale et sur la solidarité en exécutant ou blessant grièvement, àParis, des diplomates étrangers (ambassadeurs, attachés culturels ou militaires) présents en France.