Accueil > Articles > Le sacré et le profane > Bref compte-rendu des émeutes du 6 décembre à Helsinki

Bref compte-rendu des émeutes du 6 décembre àHelsinki

mercredi 10 décembre 2014

Toutes les versions de cet article : [English] [français] [Português]

Le 6 décembre, jour de l’indépendance de la Finlande, une grosse émeute (àl’échelle locale) a eu lieu àHelsinki, la capitale, et la police estime à100.000 euros le préjudice causé par les destructions de propriété. Le 6 décembre est le jour d’indépendance nationale de la Finlande. Il s’agit de la journée pendant laquelle les nationalistes et l’élite célèbrent « une nation Finnoise unie  » et les guerres perdues au Palais Présidentiel d’Helsinki grâce àl’argent des contribuables, tandis que l’élite et les politiciens ont mené une dure campagne de mesures d’austérité contre tout le monde (sauf contre eux, évidemment).

Ces dernières années, les anarchistes et les autonomes ont organisé de jolies manifestations pacifiques devant le Palais pour protester contre les bacchanales de ces riches. Cela s’est étalé sur plus de dix ans et jusqu’au 6 décembre de l’année dernière, alors que le Palais Présidentiel était en rénovation et que les riches ont fait leur célébration dans la vieille ville ouvrière de Tampere àla place. Les anarchistes de là-bas ont organisé une manifestation contre le nationalisme, qui s’est transformée en l’une des plus grandes émeutes depuis des décennies en Finlande. Bien qu’il se soit agi d’une émeute avec apports internationaux, celle-ci a donné un gros coup de boost au mouvement anarchiste et a été àla Une des journaux pendant au moins une semaine. La police était complètement prise au dépourvu, et les 500 manifestant-e-s les ont combattu avec succès puis se sont dirigé-e-s vers le centre-ville et ont brisé les vitrines de centres commerciaux, de banques et d’autres symboles du pouvoir et du capital.

Après cet échec humiliant des flics, le parlement a débloqué plus de fonds pour l’équipement de maintien de l’ordre et la police a suivi des entraînements de stratégie appliquée aux situations d’émeute. Ils ont aussi expérimenté des tactiques de gestion des manifestations plus tôt dans l’année. Par exemple, ils ont confisqué les drapeaux des anarchistes et des Jeunes de Gauche lors des manifestations du premier mai àTampere et àHelsinki, parce qu’ils les considéraient comme des « armes  ». Du fait de ces agissements de la police, personne ne s’attendait àce que les manifestations de cette année aient autant de succès que celles de l’année dernière.

Cette année, la manifestation a de nouveau été organisée par les anarchistes, sous le thème « des faubourgs au Palais  », et l’assemblé a eu lieu àItäkeskus, un faubourg de l’est de Helsinki, dont la population est principalement composée d’immigré-e-s et de pauvres. Le début de la manif a été très calme, avec environ 300 personnes profitant d’un groupe de rap subversif et d’une bouffe vegan. L’endroit était bien choisi, puisque ces initiatives ont attiré des gamins du quartier, des immigré-e-s et d’autres personnes qui ne vont que très rarement aux manifestations.

Après que les concerts furent terminés, la manifestation a commencé às’élancer vers la station de métro la plus proche. Beaucoup de gens ne s’attendaient pas àce que la police laisse la foule s’engouffrer dans le métro, car la station était encerclée de douzaines de flics anti-émeute. A mon – et ànotre – grand étonnement, ils nous ont laissé passer et nous nous sommes amassé-e-s dans le train. La police s’attendait àce que la manif ressorte dans la station de la Gare Centrale, où ils avaient déployé l’essentiel de leurs forces. Mais au lieu de ça, c’est àune autre station que la manif est sortie, ce qui les a complètement plongés dans la confusion. En arrivant dans la rue, les manifestant-e-s ont commencé àcasser les vitrines de magasins très bien choisis, par exemple, la ventilation des restaurants Subway et Mac Donald’s a été endommagée. Les gens ont lancé des fusées de détresse et allumé des feux en criant des slogans comme « guerre de classe  » et « Que demande le peuple ? L’ANARCHIE !  ». Après un moment, les flics ont réussi àse regrouper et àrejoindre la manif pour l’escorter vers un endroit de leur choix. Ils ont tenté de déplacer la manif vers l’endroit désigné, bien loin du Palais Présidentiel, et il y a alors eu quelques petites confrontations entre les manifestant-e-s et la police. Nous sommes cependant parvenu-e-s ànous libérer de l’escorte policière, et il leur a fallu bien du temps avant de parvenir àredevenir plus nombreux que les manifestant-e-s.

La manif s’est dirigée vers les parties bourgeoises de la ville en détruisant les vitrines et en endommageant les voitures de luxe, tout en taguant des slogans. Des gens ont aussi arraché des drapeaux de la Finlande et brà»lé deux d’entre eux. Après un long moment, la police a réussi àencercler la manif, mais après une tentative manquée de rentrer àl’intérieur, ce qui a par contre conduit a des arrestations, nous avons pu échapper au siège et nous rendre vers l’une des parties les plus riches de la ville. Un grand nombre de choses ont été attaquées, des panneaux de signalisation aux bijouteries.

Finalement, la police a de nouveau réussi àencercler la manifestation. Ce qui n’a pourtant pas calmé l’émeute, et bon nombre de gens et la plupart des émeutier-e-s sont parvenu-e-s às’échapper encore une fois avant de se disperser dans des cours intérieures d’immeubles. Une centaine de personnes n’a pas réussi àsortir, et a du rester là-bas 3 heures. Au bout du compte, la police en a laissé sortir certain-e-s et arrêté le reste, après avoir filmé tout le monde en train de dire leur nom, leur numéro de sécurité sociale et ainsi de suite.

Au final, une trentaine de personnes ont été arrêtées, dont des journalistes et des passant-e-s, dont la plupart n’avait pas du tout participé aux destructions de propriété. Toutes ont cependant été accusées d’émeute, d’agression et de refus d’obtempérer aux ordres de la police. La police a estimé que plus de 100.000 euros de dégâts et de destruction ont été provoqués contre la propriété.

Pour conclure, cette nuit a été un grand succès pour les anarchistes et la manifestation a attiré des gens qui n’avaient jamais participé àune manif auparavant. Bien sà»r, ce genre de manifestations ne sont qu’une infime partie de la lutte de classe quotidienne, mais elle a fait vivre aux participant-e-s une belle expérience. Espérons que cette tradition continuera l’année prochaine.

[Repris de Contrainfo]


Plus de photos de la manif ici.

Portfolio