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Hallucinations, intimidation et contrôle

Texte du compagnon Francisco Solar àpropos des arrestations de l’Opération Pandora

jeudi 26 mars 2015

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Nous diffusons quelques mots du compagnon anarchiste Francisco Solar sur l’Opération Pandora, alors qu’ils nous parviennent après avoir passé le contrôle des communications et le retard que cela provoque. Nous rappelons qu’actuellement, les 11 compagnon-nes qui avaient été arrêté-es dans le cadre de cette opération, et dont 7 avaient été mis-es en prison, sont àprésent tous et toutes dehors, avec des charges et sous contrôle judiciaire.

« On nous poursuit ? Et bien, c’est logique qu’on nous poursuive, parce que nous sommes une menace constante contre le système qu’ils représentent. Pour qu’on ne nous poursuive pas, nous devons nous conformer et nous adapter àleurs lois, nous intégrer àleur système, nous bureaucratiser jusqu’àla moelle et être de parfaits traîtres…. Mais, voulons-nous être ainsi ? Non. Alors, notre pratique quotidienne doit se nourrir de notre imagination créatrice, notre force réside dans notre capacité de résistance. Ils pourront nous briser, mais nous ne devons jamais plier devant personne.  »
Buenaventura Durruti.

Les explications du coup répressif du 16 Décembre sont sans doute nombreuses et très variées, des causes générales et spécifiques peuvent s’entrecroiser pour tisser les filets délirants du pouvoir qui ont mené àl’incarcération de nos ami-es et compagnon-nes.
L’une des causes générales a peut être àvoir avec l’inauguration et la mise en Å“uvre de la Loi de Sécurité Citoyenne, connue comme “Ley Mordaza†[loi bâillon ; NdT]. Celle-ci, avec le durcissement du code pénal qui rétablit la condamnation àperpétuité, fournit un cadre destiné àexercer un contrôle plus efficace de la part de l’autorité qui se blinde dans sa paranoïa constante. Les peines pour atteinte àl’autorité, pour troubles àl’ordre public et pour désobéissance se durcissent, de même que sont punies les protestations sociales comme celles menées pour le 15M [Mouvement des Indignés ; NdT] ou la PAH (Plateforme des Affectés par l’Hypothèque immobilière). Les secteurs progressistes et sociaux-démocrates affirment que par làl’État “laisse moins d’espace de liberté†et qu’on “criminalise la lutte pour les droits†. Comme on le voit, ce tour de vis de l’appareil juridico-repressif attaque le citoyen, c’est-à-dire, ceux qui luttent pour plus et de meilleurs droits, pour plus et une meilleure démocratie, pour obtenir un plus haut niveau de participation dans l’administration de la misère.
Liberté et droit, cela sonne de manière contradictoire. En tant qu’anarchistes, nous comprenons qu’en octroyant plus de droits, l’État se renforce et que notre soumission n’en est que plus grande. Ce n’est pas en étant plus subtile, plus démocratique, que l’oppression cessera d’exister, au contraire, elle se naturalise en se faisant invisible et en ressort renforcée. Nous refusons donc la catégorie de citoyens, nous cherchons inlassablement et obstinément àêtre des individus libres et nous ne sommes pas disposé-es àmendier plus de maillons ànos chaînes. La lutte pour les droits citoyens n’est pas la nôtre.
Il est donc probable que sur ce chemin de durcissement des mécanismes de contrôle, le pouvoir ait voulu frapper les anarchistes dans une claire volonté d’intimidation qui fait savoir àtous les conséquences du fait de prendre position contre lui. Ce n’est pas nouveau. En de nombreuses occasions le pouvoir a “eu recours†aux anarchistes pour expérimenter ses adaptations et modifications légales destinées àse renforcer.
Le développement indéniable des protestations de rue l’année dernière àBarcelone, tant en nombre qu’en intensité, peut être une autre cause de l’incarcération de nos ami-es. La disparition de la peur dans les manifestations est notoire et notable, ce qui implique un refus en pratique des valeurs civiques propres au comportement citoyen. Durant quelques instants, les jeunes prennent le contrôle de leurs vies en rompant avec l’ordre établi et c’est la propagation et l’extension de ces moments fugaces que le pouvoir tente de freiner avec sa stratégie classique ; répression et prison pour celles et ceux qui revendiquent explicitement et publiquement la Libération Totale.

Le F.I.E.S. en prison et dans la rue

Au delàdes causes découlant du cadre général de contrôle comme la création de la loi de Sécurité Citoyenne et le durcissement du code pénal, on se trouve aussi face àla tactique répressive utilisée par différents états-nationaux contre des mouvements anarchistes qui se traduit par des emprisonnements massifs avec des accusations aussi imprécises que celle de terrorisme. Marini, Cervantes (Italie), Caso Bombas (Chili), Ardire (Italie) et cette nouvelle Opération Pandora (Espagne) font partie de la même logique et sont des exemples d’une stratégie qui, plus que s’attacher àdéterminer des responsabilités quant àdes faits concrets, frappe des espaces anarchistes spécifiques en essayant ainsi d’exercer un contrôle de fer sur l’anarchisme en général. Mesures spéciales de sécurité en prison, filatures et écoutes téléphoniques dehors. Le contrôle est constant et direct et s’élargit àdifférents et de multiples espaces en utilisant plus de et une meilleure technologie. Que les personnes arrêtées soient ou pas responsables des actions dont on les accuse (ce qui en l’occurrence constitue aussi une énigme), n’intéresse guère le pouvoir, ce n’est pas le propos -cela est évident, entre autres nombreux aspects, de par le manque, voire l’absence des accusations. On cherche àexercer un contrôle direct àbase de baffes permanentes dont l’objectif principal est de provoquer l’inaction et la démobilisation. Si ces coups répressifs entraînent la mise sous enquête et par conséquent la surveillance d’une grande partie du mouvement anarchiste et même de certains secteurs gauchistes, l’application du droit pénal de l’ennemi définie par l’idéologue nazi Carl Schmitt et l’entrée en prison qui en suit ne sont réservées qu’àquelques-un-es ; àcelles et ceux qui revendiquent sans ambiguïtés l’affrontement contre le pouvoir, qui insistent sur l’autonomie et la liberté sans restrictions sans se laisser porter par des mirages citoyens ou d’indépendance nationale, qui utilisent toute leur créativité et leur volonté pour construire des réseaux de soutien et de solidarité avec leurs prisonnier-es. C’est une constante dans tous les assauts du pouvoir dans différents pays, et je pense que l’incarcération de nos compagnon-nes et ami-es ne fait pas exception.

Francisco Solar Domínguez
Centre Pénitentiaire Villabona - Asturias
Module d’Isolement.

Pour écrire àFrancisco et Monica :

Francisco Javier Solar Domínguez
C.P. de Villabona
Finca Tabladiello s/n
33271 Villabona-Llanera (Asturias)

Mónica Andrea Caballero Sepúlveda
à vila-Prisión Provincial
Ctra. de Vicolozano s/n
05194 Brieva (Ã vila)

[Traduit de l’espagnol d’Indymedia Barcelona par Brèves du désordre]