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Pourquoi nous ne les soutiendrons jamais

Le Hezbollah, le Hamas ou tout autre groupe armé dit de « résistance anti-impérialiste »

jeudi 8 novembre 2018

Littéralement le Parti de Dieu (Hizb Allah), le Hezbollah se décline en deux silhouettes, une branche civile qui peut être comparée àun parti politique, et une branche armée, sa nature première. Il fut créé lors de l’invasion israélienne du Liban en 1982, d’emblée financé par l’Iran et la Syrie qui resteront jusqu’àaujourd’hui ses principales sources de financement avec entre autres, le commerce de diamants, le racket et autres sources de financement occultes comme le trafic international de drogue (notamment avec des filières démantelées en juin 2005 au Brésil et en Équateur). La branche armée du mouvement politique chiite libanais serait aujourd’hui plus puissante que l’armée nationale libanaise.

De plus, le parti joue un rôle social important au Liban. Il y est le premier employeur , il a aussi permis la création d’hôpitaux, d’orphelinats, d’écoles, de soupes populaires et autres services rendus àla population en échange d’une adhésion idéologique au national-islamisme du parti. Seulement le Hezbollah n’est pas un mouvement social implanté localement et attirant la sympathie puisque son traitement des civils passe aussi parfois par leurs utilisation en bouclier humain, provoquant la mort de nombreux libanais civils. Pourtant le Hezbollah, par ses fait d’armes contre l’armée israélienne, s’attire la sympathie de nombreuses puissances politiques arabo-musulmanes, mais aussi de nombreuses organisations d’extrême gauche, ou d’extrême droite notamment en France. C’est aussi le cas du Hamas, acronyme partiel de harakat al-muqâwama al-’islâmiya (« mouvement de résistance islamique  ») mouvement islamiste palestinien sunnite important dont les attaques de sa branche armée, tout comme le Hezbollah, visent indistinctement civils et militaires israéliens.

Comment la majorité de l’extrême gauche et une partie du mouvement libertaire peut elle se solidariser avec ces partis totalitaires et ultra-religieux ? Cette solidarité, c’est « l’anti-impérialisme des imbéciles  » [1]. Un alter mondialisme qui dérive et dérape. Qui dérape lorsque son anti-sionisme se mue en un antisémitisme, somme toute, assez classique dans l’histoire de la gauche. Qui dérive lorsque ses prémisses sont invalides. En effet, pour ces gens, « les ennemis de mes ennemis sont mes amis  ». La politique déplorable du commandement israélien les poussent àsoutenir toute forme de contestation de cette politique belliqueuse, et ce quitte àopérer des alliances avec l’islam politique, les ultra-religieux, les nationalistes arabes et l’extrême droite parfois néo-nazie. Quand les gudards rencontrent les gauchistes…

Daniel Bensaïd, maitre àpenser et théoricien de la LCR, estime par exemple que « Tariq Ramadan peut être (ou devenir) un théologien alter mondialiste. Il peut constituer un allié de circonstance dans les combats contre l’uniformisation marchande et la misère du monde  » [2] . Ramadan, fervent défenseur de l’Iran, du Hezbollah, du Hamas, de la femme au foyer, de l’excision et de la charia. C’est la déliquescence théorique qui pousse cette extrême gauche contestataire (mais institutionnelle) àse jeter dans les bras des premiers fascistes verts venus sous le simple prétexte de combattre un ennemi commun, ou parce que cet « islam de libération  » revêt parfois la dalmatique rouge. L’Islam, qui signifie soumission, peut il être de libération ? Aucune religion ne peut prétendre libérer, nous connaissons l’Histoire.

Cette partouze idéologique a trouvée son catalyseur avec le conflit israélo-palestinien. On peut aisément s’étonner de l’aura de ce conflit qui malgré sa durée, reste d’un point de vue strictement géopolitique un conflit de faible intensité avec une population concernée bien plus faible que dans nombreuses autres guerres qui elles, ne semblent pas agiter autant de verve… Darfour, Somalie, Kenya, kashmir, Thaïlande, Timor, Tchétchènie, Afghanistan, Népal, Sri Lanka, Tchad etc.. comment ce pays qui compte moins d’habitants que la ville de Paris peut il prendre une telle importance symbolique dans la rhétorique fatigante de ces anti-impérialistes ?

Pourquoi sont ils si discrets sur les conflits qui ne concernent ni Israë l, ni les États-unis ? Comme le fait remarquer Yves Coleman dans la revue Ni Patrie Ni Frontières, « On se rappellera […] que les altermondialistes et les « gauchistes  » ne connaissent dans le monde qu’une seule « théocratie  », Israë l ; qu’ils ignorent complètement la théocratie iranienne ; qu’on ne les entend presque jamais dénoncer les théocraties des pétromonarchies - sauf pour leurs liens avec les États-Unis - et qu’ils furent très discrets quand les talibans étaient au pouvoir en Afghanistan  ». Les innombrables appels au boycott du salon du livre 2008 consacré àla littérature israélienne en sont la preuve. La Russie était l’invitée du salon du livre 2005. Il n’y a pas eut du tout de tapage, et pourtant ! La Tchétchénie, les meurtres politiques, les arrestations d’opposants ... mais, chut ! ce n’est pas l’axe américano-sioniste.

La solidarité et la dénonciation se fait àla tête du client, le juif étant le client le plus indésirables pour ces « anti-impérialistes  » adeptes des séculaires théories du complot juif et de la plus récente théorie du complot américano-sioniste. Ces organisations s’attachent àdénoncer avec raison le terrorisme d’État israélien et sa violence envers les populations civiles arabes israéliennes, palestiniennes et libanaises et omettent (sans aucune innocence) de déplorer les victimes juives et arabes des tirs de kassam àSderoth (par exemple). L’on voit bien rarement (entendre par la, « jamais  ») de la part de ces mêmes organisations de condamnation de l’instrumentalisation des populations civiles réifiées en boucliers humains, de l’intégrisme islamiste du Hezbollah et du Hamas, de l’oppression radicale des femmes et des homosexuels, du concept de guerre sainte etcétéra. Fait pour le moins étonnant de la part d’athées, de libertaires ou de marxistes. Cette soudaine tolérance de l’extrémisme religieux, en contradiction totale avec les slogans officiels de façade, montre bien la validité et la cohérence de ces organisations et nous rappelle àquel point hormis la droite et l’extrême droite, la gauche et l’extrême gauche représentent tout ce que nous détestons le plus.

La gauche de la gauche montre en effet de nos jours une résurgence inquiétante de l’antisémitisme. Mais pas cet antisémitisme très minoritaire et marginalisé [sic] par le reste du mouvement qu’étaient par exemple les révisionnistes d’ultra-gauche des années 70 [3] . Il s’agit cette fois d’un antisémitisme lattent (mais bien présent), pas assumé (pas assumable ?) et cette fois majoritaire dans de nombreuses fractions de ce mouvement sous couvert d’antifascisme. La majorité des militants LCR soutiennent ouvertement le Hamas. Les Indigènes de la République, qui luttent « sur des bases de races  » soutiennent publiquement la Tribu Ka [4] et son leader Kemi Séba qui remplaça le banal slogan "black, blanc beur" par "Kémites, Aryens, Palestiniens". Indy media voit de plus en plus pulluler la prose d’antisémites de gauche. On a pu apprendre par exemple que Carla Bruni était une agent du Mossad [5] , que la justice était contrôlée par la franc-maçonnerie juive, ainsi que les médias, que les végétaliens étaient des sionistes puisque la vie d’une poule vaudrait plus pour eux que la vie d’un enfant palestinien. J’en passe et des meilleures. Le « complot sioniste  » devient l’explication unilatérale du capitalisme [6] et la tolérance pour un antisémitisme qui se cache de moins en moins sous le masque de la solidarité avec la Palestine, devient légion. Comment des personnes qui se disent antifascistes peuvent elles défiler cote àcote avec ces fachos au lieu de les virer hors manif comme ils le feraient (prétendument…) avec des néo-nazis ?

Cette extrême gauche confusionniste qui mêle pêle-mêle la solidarité anti-impérialiste anti-israélienne, les théories du complot sur le 11 septembre 2001, La défense inconditionnelle des luttes de libération nationale, toute forme de nationalisme de gauche, le soutien aux FARC, àChavez, Ahmadinedjad, Castro et autres dictateurs et dictatures rouges-vertes-brunes et qui se ballade en keffieh et t-shirt Che Guevara ou EZLN de rigueur, qui ne vit que sur son propre folklore, qui aime les dieux et les maîtres, qui sert de passerelle et de cheval de Troie àl’extrême droite dans l’extrême gauche, qu’elle crève !
Et vite !

Extrait de Non Fides N°2, 2008.


Suite àla publication de ce texte par des sites ennemis, nous avons rédigé un communiqué sur le sujet : Le théorème parfait de la guerre civile.


[1Selon la formule d’Eric Krebbers dans De Fabel van de illegaal, trimestriel néerlandais.

[2Fragments mécréants. Mythes identitaires et république imaginaire. 2005.

[3Cf. par exemple « La Vielle Taupe  » qui devient clairement antisémite en 1979 avec Pierre Guillaume.

[4« Kemi Seba a été condamné comme noir, et, àtravers lui, c’est nous tous, Noirs, Arabes et musulmans, qui avons été condamnés  ». La tribu Ka organisait régulièrement des réunions interdites aux Blancs (les « Leucodermes  »), aux Juifs (les « Hyksos  ») et aux Arabes. Ils souhaitent la séparation noirs/blancs et accusent les juifs d’avoir perpétrés la traite des noirs.

[5Quand une cible traditionnelle du conspirationnisme en rencontre une autre, juifs et services secrets.

[6Cf. le vieux mythe du capitalisme rotschildien ancré àla gauche française depuis le XIXe siècle.