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Quelques remarques des Luftmenschen sur un texte de NPNF
mardi 13 septembre 2011
Tu nous as demandé notre avis sur l’invenÂtaire de la confuÂsion dressé pour le proÂchain numéro de la revue. Te donner celui-ci point par point serait très fasÂtiÂdieux et, à la réflexion, ce n’est pas le plus utile. Le proÂblème d’un invenÂtaire dans la situaÂtion actuelle, même lorsqu’on préÂcise qu’il n’est pas exhausÂtif, est que l’on peut touÂjours s’interÂroÂger sur le choix de ses entrées plutôt que d’autres, tout aussi évidÂentes objecÂtiÂveÂment.
Par exemÂple, hisÂtoÂriÂqueÂment, il s’avère que tous les sites que tu cites, quaÂsiÂment, n’auraient pas l’écho qu’ils ont aujourd’hui sans deux iniÂtiaÂtiÂves que tu ne cites pas : Bellaciao et le réseau Indymedia qui ont été, et sont, les deux prinÂciÂpaux vecÂteurs de publiÂcité pour les autres sites à l’intérieur de l’extrême gauche, notamÂment actiÂviste, et même au-delà dans les pérÂiodes de mouÂveÂment social.
Pour toute une généÂration de miliÂtants, en gros depuis le début des années 2000, ces sites ont été l’endroit où l’on venait cherÂcher les infos « indépÂendÂantes  » sur ce qui se pasÂsait et aussi celui où l’on lançait ses proÂpres rendez-vous.
Et c’est là aussi que les négatiÂonnÂistes, les antiÂsioÂnisÂtes, les soraÂliens, les tenants de l’islam poliÂtiÂque, les régÂioÂnalÂistes plus ou moins ambiÂgus, les proÂtecÂtionÂnisÂtes natioÂnaÂlisÂtes, les charÂlaÂtans anti-vacÂciÂnaÂtion ou anti-science, les désoÂbéissants, les comÂploÂtisÂtes ont trouvé un média de masse pour relayer leur proÂpaÂgande et faire connaître leurs proÂpres médias.
Les citer ne vise pas seuÂleÂment à dénÂoncer, même si pour notre part nous assuÂmons parÂfaiÂteÂment le fait de poinÂter des resÂponÂsaÂbiÂlités, et si, jusÂteÂment, une partie du corpus idéoÂloÂgique pasÂseÂrelle a consisté à parler de « délation  », d’« inquiÂsiÂtion  », de « police de la pensée  », de « staÂliÂnisme  », à propos de tous les camaÂraÂdes qui s’insurÂgeaient contre la difÂfuÂsion de toute cette merde sur nos proÂpres médias.
Cela permet aussi de balayer le nouÂveau concept à la mode pour expliÂquer la situaÂtion à l’extrême gauche : celui d’« infilÂtraÂtion  », repris d’ailleurs aussi dans le disÂcours synÂdiÂcal tenu concerÂnant les miliÂtants du FN présents dans ces strucÂtuÂres. L’idée « d’infilÂtraÂtion  » évoque de somÂbres et sourÂnoiÂses maniÂpuÂlaÂtions, faites par des gens qui n’auraient pas avancé à visage décÂouvert, mais pris le masque de vrais révoÂlutiÂonnÂaires, ou même de vrais proÂgresÂsisÂtes, pour le tomber le jour où ils auraient pris le contrôle de nos strucÂtuÂres. Il évoque inciÂdemÂment aussi la posÂsiÂbiÂlité de stratégies fomentées par l’Etat ou des barÂbouÂzes. D’ailleurs, une partie des antiÂsioÂnisÂtes comÂploÂtisÂtes, aujourd’hui, avance cette théorie concerÂnant leurs frères enneÂmis ouverÂteÂment d’extrême droite : ceux-ci seraient envoyés par les « sioÂnisÂtes  » pour disÂcréÂditer le mouÂveÂment.
Or, la réalité des faits, attestée par les archiÂves, montre qu’il n’y a eu aucune infilÂtraÂtion : il y a eu la parÂtiÂciÂpaÂtion assumée d’une partie de l’extrême gauche à cerÂtaiÂnes iniÂtiaÂtiÂves poreuÂses dès le départ. Des mouÂveÂments anti-guerre menés d’office avec des strucÂtuÂres reliÂgieuÂses ou natioÂnaÂlisÂtes, au mouÂveÂment alterÂmonÂdiaÂliste franÂchouillard et à sa défÂense de notre agriÂculture et de notre roqueÂfort, de la dénÂoncÂiation du « plomÂbier poloÂnais  », du disÂcours contre la déloÂcaÂliÂsation et pour le souÂtien à « nos  » emplois et à « nos  » entreÂpriÂses au souÂtien incondiÂtionÂnel à la partie du mouÂveÂment palesÂtiÂnien incarnée par le Hamas, dénommé « Résistance  » par quaÂsiÂment toute l’extrême gauche.
L’extrême droite n’est pas venue nous cherÂcher, affuÂblée d’un cosÂtume de grand-mère bienÂveillante pour tromÂper d’innoÂcents petits chaÂpeÂrons rouges : elle s’est simÂpleÂment insÂtallée là où les référÂences et la culture domiÂnanÂtes lui donÂnaient sa place.
Tu énonces certes un cerÂtain nombre de ces référÂences idéoÂloÂgiques : mais elles sont en fait bien plus proÂfonÂdes que cela et touÂjours vivanÂtes, et surÂtout portées par ceux-là mêmes qui, depuis deux ans, devant la maison qui brà »le, se sont résolus à jeter quelÂques verres d’eau pour tenter d’éteÂindre l’incenÂdie.
Ainsi Le Grand Soir, à propos d’un texte publié contre lui par Article 11 a-t-il fait remarÂquer, que ce derÂnier publiait du Céline.
Ainsi, les fasÂcisÂtes répÂondent-ils, sans qu’on puisse les contreÂdire, que Sorel et son Å“uvre n’apparÂtienÂnent pas en propre aux liberÂtaiÂres qui s’en revenÂdiÂquent, de la CNT à Alternative Libertaire, dans la mesure où Sorel, concrèÂtement et actiÂveÂment, a pris part à la consÂtiÂtuÂtion de la droite natioÂnale en France.
Ainsi, le Jura Libertaire, site référÂence de l’ensemÂble du mouÂveÂment anarÂchiste, « traÂdiÂtionÂnel  » ou plus « sauÂvage  », a-t-il consaÂcré de nomÂbreux artiÂcles à Michéa, réactiÂonnÂaire adulé par les soraÂliens.
Ainsi, Noam Chomsky est-il encore publié par Indymedia Paris, qui pourÂtant entend désÂormais alerÂter sur l’« infilÂtraÂtion fasÂciste  » à propos de la pétition de P.-E. Blanrue, signée...par Chomsky.
Ainsi, un mouÂveÂment aussi consenÂsuel que la CIP-IDF a-t-il jugé perÂtiÂnent de prenÂdre comme slogan pour la camÂpaÂgne contre son expulÂsion une référÂence savante à Heidegger « Nous avons besoin de lieux pour habiÂter le monde [1].  »
Ainsi, à propos des sans-papiers tuniÂsiens, trouve-t-on très smart de les appeÂler « harÂraÂgas  », terme qui fait référÂence à leur statut de clanÂdesÂtins et est employé par la presse capiÂtaÂliste au Maghreb, quand TOUT le combat depuis Saint-Bernard a consisté de la part des preÂmiers concernés à impoÂser le mot « sans-papiers  » face à la proÂpaÂgande du pouÂvoir. [2].
Bien sà »r, ces quelÂques remarÂques et l’anaÂlyse pesÂsiÂmiste qu’elles sous-tenÂdent peuÂvent déclÂencher la réaction suiÂvante : les Luftmenschen ne sont jamais contents et veuÂlent-ils autre chose que disÂcréÂditer l’extrême gauche à tout jamais ?
On pourÂrait en effet s’attenÂdre à ce que nous nous réjouÂissions d’un cerÂtain nombre de choses :
Après tout, l’antiÂfasÂcisme est désÂormais majoÂriÂtaiÂreÂment perçu comme une nécÂessité, quand depuis au moins 2007, il était raillé comme une réaction d’« idiots utiles  » face à une réalité soi-disant grouÂpusÂcuÂlaire.
Enfin, nos textes, dénigrés si longÂtemps par toute l’extrême gauche, hormis NPNF, la CNT-AIT et quelÂques maoïstes de l’Action Antifasciste sont difÂfusés larÂgeÂment et mis en note de bas de page dans d’autres textes.
Ecrire le mot « antiséÂmite  » n’est plus forcément synoÂnyme de cenÂsure et d’anaÂthème.
Malheureusement, cette proÂgresÂsion interÂvient bien tard et dans une extrême gauche qui n’est plus que le fantôme d’elle-même. Désormais, les fasÂcisÂtes n’ont plus besoin de nos médias, les leurs sont bien plus visités. Et il suffit d’aller sur les réseaux sociaux pour prenÂdre consÂcience de la réalité et du résÂultat de toutes ces années de confuÂsion ignoÂble : la nouÂvelle généÂration de gens qui se quaÂliÂfient de « révoÂlutiÂonnÂaires  », d’« indiÂgnés  », d’« anti-système  » difÂfuse et reprend indifférÂemment du Bakounine ou du Soral, et pense que dénÂoncer le capiÂtaÂlisme, c’est aussi bien dénÂoncer la réfÂorme des retraiÂtes que les « vacÂcins-tueurs  » ou les Illuminati, avec une nette préÂférÂence pour les deux derÂniers, plus exciÂtants et senÂsaÂtionÂnaÂlisÂtes.
De plus en plus souÂvent, une mésavÂenÂture terÂriÂble arrive à ceux des miliÂtants qui entenÂdent désÂormais dénÂoncer l’« infilÂtraÂtion  » : ce sont eux qui sont stigÂmaÂtisés par les gens comme des « infilÂtrés  » venus détrÂuire un mouÂveÂment où les idées et les mouÂveÂments fasÂcisÂtes ont toute leur place.
Ainsi Fabien Engelmann a-t-il été défÂendu par toute sa secÂtion et ce n’est pas un cas isolé, tout miliÂtant CGT de bonne foi ne niera pas la réalité : des secÂtions entières sont contrôlées ici et là par le Front natioÂnal et la Confédération n’ose pas agir...de peur de perdre la bataille. On apprend inciÂdemÂment par Riposte Laïque que Pierre Cassen est touÂjours membre du synÂdiÂcat du Livre et que seule une partie des diriÂgeants de ce synÂdiÂcat se réveillent molÂleÂment en jugeant utile, un an après l’apéro sauÂcisÂson-pinard, de lui demanÂder quelÂques expliÂcaÂtions.
Les iniÂtiaÂtiÂves contre les Dîners du Siècle ramènent plus de fasÂcisÂtes que de gauÂchisÂtes, qui ont d’ailleurs renoncé devant l’imposÂsiÂbiÂlité d’y faire quoi que ce soit.
De plus, les « antiÂfasÂcisÂtes  » se retrouÂvent pris au piège de leurs proÂpres arguÂments : ils n’ont RIEN à répÂondre aux fasÂcisÂtes qui invoÂquent la liberté d’expresÂsion qu’eux-mêmes ont défÂendue et défÂendent comme valeur fonÂdaÂmenÂtale et fonÂdaÂtrice de leurs actions.
Ils n’ont rien à répÂondre aux miliÂtants sincères qui ont comÂmencé leur combat en appreÂnant que l’« oliÂgarÂchie  » c’est l’ennemi, et qui ne comÂprenÂnent pas qu’on ostraÂcise des fasÂcisÂtes qui ont EXACTEMENT les mêmes cibles que l’extrême gauche. Et l’« oliÂgarÂchie  » reste touÂjours la notion prinÂciÂpaÂleÂment utiÂlisée par l’extrême gauche.
Ils n’ont rien à répÂondre à des fasÂcisÂtes qui leur font remarÂquer que leur brusÂque réaction ne s’expliÂque par RIEN de rationÂnel, dans la mesure où le disÂcours tenu est exacÂteÂment le même depuis des années, et qu’il n’a jamais posé proÂblème depuis des années.
Certains en sont réduits à des contorÂsions idéoÂloÂgiques et praÂtiÂques absurÂdes : ainsi dans ton lexiÂque, tu cites Europalestine. Certains Indymedia ont effecÂtiÂveÂment fait le choix de ne plus publier du Europalestine : mais d’un autre côté, comme ils sont soliÂdaiÂres de la camÂpaÂgne BDS, ils publient les textes de ce regrouÂpeÂment...sauf ceux qui ont trait à sa prinÂciÂpale actiÂvité actuelle, la défÂense d’Olivia Zemmor.
Tu poses une partie de ces proÂblèmes dans ton lexiÂque : mais à notre avis, penser pouÂvoir couper les branÂches sans s’attaÂquer à la racine concrèÂtement ne va pas mener bien loin, comme le montre ce derÂnier exemÂple.
Et s’attaÂquer à la racine signiÂfie malÂheuÂreuÂseÂment traîner les camaÂraÂdes de force devant un miroir : la chasse aux « infilÂtrés  », c’est là qu’elle comÂmence, chez ceux qui se vivent aujourd’hui comme antiÂfasÂcisÂtes mais refuÂsent de reveÂnir sur ce qui s’est passé et refuÂsent de reveÂnir sur la strucÂture et l’idéoÂlogie actuelle du mouÂveÂment. Acter la défÂaite et nos resÂponÂsaÂbiÂlités énormes dans cette défÂaite, voilà la prioÂrité.
Pour notre part, si invenÂtaire il devait y avoir, ce serait plutôt celui de ce qui nous reste, de ce qui n’est pas contaÂminé par la pensée brune. Ce serait bien plus court, malÂheuÂreuÂseÂment et cela entraîÂnerait un seul remède : reparÂtir de zéro, de la base, à notre boulot, dans nos quarÂtiers, au lieu de courir après les mouÂveÂments « gloÂbaÂliÂsants  », les granÂdes iniÂtiaÂtiÂves « anti-système  », où de fait nous sommes désÂormais minoÂriÂtaiÂres et dans l’incaÂpaÂcité proÂviÂsoire sans doute de faire face à la vague brune.
Et ce serait aussi sans doute s’interÂroÂger de manière plus posiÂtive sur ce qui a fait que cerÂtaiÂnes comÂpoÂsanÂtes du mouÂveÂment n’aient pas pris les pasÂseÂrelÂles.
Il y a déjà quelÂques années que notre petit blog, ta revue mais égaÂlement la CNT-AIT, mais aussi des grouÂpes maoïstes, des grouÂpes léninÂistes comme le CCI, et des iniÂtiaÂtiÂves plutôt socio-démocÂrates comme Conspiracy-Watch sont désignées notamÂment par les natioÂnaux-révoÂlutiÂonnÂaires présents à l’extrême gauche comme une mouÂvance unique et orgaÂnisée, les « antiÂfasÂcisÂtes en peau de lapin  », comme ils disent. Selon les verÂsions, la « tête penÂsante  » de tout cela est désignée comme étant la mouÂvance maoïste ou la comÂpoÂsante social-démocÂrate.
La réalité évidÂemment est tout autre : issus de comÂpoÂsanÂtes très différÂentes et en affronÂteÂment perpétuel avec la gauche et l’extrême gauche, nous n’avons jamais vraiÂment pris acte d’une réflexion et d’un posiÂtionÂneÂment pourÂtant très proÂches sur la quesÂtion de l’antiÂfasÂcisme et des pasÂseÂrelÂles.
Bien au contraire et très logiÂqueÂment, il répugne à l’anarÂchiste qui a anaÂlysé la dérive comme une excroisÂsance du staÂliÂnisme, d’admetÂtre qu’une partie des maos ait pu, à partir de leurs proÂpres outils, forger une criÂtiÂque valaÂble de ce qu’on appelle les rouges-bruns.
A l’inverse, le comÂmuÂniste pense souÂvent que la dérive est due aux « allianÂces à tout prix  » faites par les anarÂchisÂtes au nom de la bataille contre le comÂmuÂnisme autoÂriÂtaire et liée à l’insufÂfiÂsance proÂfonde du mouÂveÂment anarÂchiste sur les quesÂtions de classe.
Quant aux anaÂlysÂtes plutôt démocÂrates et sociaÂlisÂtes, chez eux, c’est la thèse de l’alliance des extrêmes qui est souÂvent prônée, et le fait est que toutes les pasÂseÂrelÂles évoquées ne plaiÂdent pas dans le sens inverse, au moins au preÂmier regard.
Tout nous divise de fait et l’invenÂtaire des diviÂsions indépÂasÂsables a été fait depuis au moins 1917, perpétuÂelÂlement.
Par contre, a-t-on vraiÂment réfléchi à ce qui avait bien pu nous amener à résÂister à la vague, avec des apports cultuÂrels et poliÂtiÂques pourÂtant si différents ?
Il ne s’agit pas de faire du passé table rase et d’appeÂler naïÂvement à la vieille renÂgaine de l’unité, mais tout de même d’oser poinÂter nos converÂgenÂces et d’en faire quelÂque chose [3].
Luftmenschen, 19 juin 2011.
Via NPNF.
[1] Note de Ni patrie ni fronÂtières : Nous ne nous lanÂceÂrons pas dans l’exéÂgèse de Heidegger. Notons seuÂleÂment que si la réflexion sur l’espace et le temps est imporÂtante chez ce phiÂloÂsoÂphe, il n’y a qu’une toute petite différÂence entre le Raum (l’espace) et le Lebensraum (l’espace vital, cher aux preÂmiers géoÂpoÂliÂticiens alleÂmands de la fin du XIXe siècle, puis aux théoÂriciens nazis). Une proxiÂmité qui aurait dà » alerÂter la CIP. Mais la confuÂsion ne s’arrête pas à la CIP. En effet, un « séminÂaire autogéré  » et pluÂriÂdisÂciÂpliÂnaire (rasÂsuÂrez-vous le perÂsonÂnel d’entreÂtien n’était pas invité !) à l’intiÂtulé fort radiÂcal (« Propriété et résÂistÂances  ») a été orgaÂnisé durant l’année 2011 par les élèves de l’Ecole norÂmale supériÂeure, ce haut lieu supÂposé de l’intelÂliÂgentÂsia de gauche. L’un des textes introÂducÂtifs comÂmençait jusÂteÂment par cette citaÂtion de Heidegger reprise par la CIP, et reproÂduiÂsait égaÂlement des extraits de l’artiÂcle « Bâtir, habiÂter consÂtruire  » dont elle est extraite. Notamment cette phrase immorÂtelle : « Si dur et si pénible que soit le manque d’habiÂtaÂtions, écrivit Heidegger en 1951, si sérieux qu’il soit comme entrave et comme menace, la vériÂtable crise de l’habiÂtaÂtion ne consiste pas dans le manque de logeÂments  ». Nos norÂmaÂliens (de gauche, car ils citent aussi un livre d’Henri Lefebvre – à moins que ce ne soit une pose post-moderne : un nazi + un marxiste = neuÂtraÂlité « scienÂtiÂfiÂque  » garanÂtie) se senÂtent sufÂfiÂsamÂment gênés pour reconnaître que cette remarÂque « appaÂraît comme décÂonnectée des urgenÂces sociaÂles de son époque  » (qu’en termes délicats ces choses-là sont dites !) car « dans l’Allemagne détrÂuite par la guerre des milÂliers de gens dorÂment à la rue  ». Tout comme en 2011 en Europe et en Amérique, non ?… Mais nos futurs proÂfesÂseurs ou cadres supérieurs ne se sont pas demandés à quoi diable pouÂvait servir d’étudier un tel texte si l’on vouÂlait réfléchir sériÂeuÂsement à « Une poliÂtiÂque de l’habiÂter  » (autre forÂmule chic, très Rive Gôche). Les vieux marxisÂtes dogÂmaÂtiÂques avaient du bon : ces propos auraient insÂtanÂtanément été quaÂliÂfiés de « forÂmule creuse idéalÂiste  » par ces ouvriérÂistes bornés. En effet, « les idées ne sont rien d’autre que les choses matériÂelles transÂposées et traÂduiÂtes dans la tête des hommes  » (Marx). Et les idées qui sorÂtent du cerÂveau embrumé d’un nazi (même repenti) ne serÂvent qu’à disÂsiÂmuÂler les mesuÂres les plus réactiÂonnÂaires et les réalités les plus somÂbres de la société capiÂtaÂliste en crise. Mais cela, on ne l’apprend appaÂremÂment pas à l’ENS !
[2] Note de Base de données anarchistes : « Sans-papiers  », tout comme « Harragas  » ou « clandestins  » d’ailleurs, sont des dénominations du pouvoir et sont donc toutes à rejeter au même titre. Cela ne pose-t-il donc problème à personne de définir un individu par son défaut de papier ?
[3] Note de Base de données anarchistes : nous avons décidés de publier ce texte malgré cette proposition d’unité qui ne tient absolument pas la route selon nous.